INTERVIEW - Des tsars à Poutine, un pouvoir russe autocratique

Avec le règne d’Ivan le terrible au XVIe siècle, le pouvoir en Russie prend une dimension autocratique. Une seule personne détient le pouvoir absolu.  

Comment cette pratique personnelle du pouvoir a-t-elle traversé les siècles, jusqu’à Vladimir Poutine ? Pour en parler, Virginie Girod reçoit Pierre Gonneau, professeur à Sorbonne Université et directeur d’études à l’École pratique des hautes études, spécialiste du monde russophone et auteur de La Guerre Russe ou le prix de l'Empire. D’Ivan le Terrible à Poutine (Tallandier).  

En 1453, la chute de Constantinople marque la fin de l’empire Byzantin. La Russie moscovite reprend le flambeau impérial. “Le tsar russe est l'héritier de l'empereur byzantin. C'est un seul monarque universel qui a vocation à diriger tous les chrétiens, en particulier les chrétiens orthodoxes” explique Pierre Gonneau.  

La Russie n’est pas encore l’immense territoire que l’on connaît aujourd’hui. Coincé entre la Volga et son affluent l’Oka, Moscou doit d’abord procéder à un “rassemblement des terres russes” divisées en principautés, prélude à son expansion. Le règne d’Ivan le Terrible (1530-1584), le premier à se faire officiellement couronner tsar, est une rupture dans l’histoire russe : “ça devient le monarque absolu, l'autocrate. (...) Tout le pouvoir vient de lui et ne peut être que délégué. Il n’y a pas de contrepoids”.  

Les tsars et tsarines vont régner plus de 350 ans sur la Russie, installant progressivement l’idée d'une monarchie populaire dans laquelle le souverain affiche sa proximité avec le peuple. L’empire laisse une marque profonde dans l’histoire russe. Dans l’Union Soviétique qui lui succède, l’autocratie perdure. Même si en principe le pouvoir est collégial, “dans les faits, aussi bien Lénine que Staline vont gouverner en autocrate” souligne Pierre Gonneau.  

Selon l’historien, la Russie contemporaine s’est éloignée du régime présidentiel pour revenir à une forme d’autocratie. Vladimir Poutine, héritier de la puissance des tsars ? “Il y a la peur du déclin qui joue comme un réflexe, pour dire qu’il faut éviter tout ce qui est morcellement. (...) C’est l’un des arguments de Poutine pour rétablir la verticale du pouvoir”.  

Thèmes abordés : Russie, URSS, Vladimir Poutine, Tsar, Gengis Khan, religion orthodoxe