Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il nous raconte la fable de la betterave et des écolos. Le gouvernement vient de présenter un projet de loi qui permet de réintroduire l’insecticide néonicotinoïde pour soutenir la culture de la betterave après l'avoir au préalable interdit pour des raisons écologiques.
Ce vendredi matin, Nicolas Beytout nous raconte une fable.
Une fable dont le titre est : la betterave et l’écolo. Il était une fois, des écolos qui, tout à leur juste combat pour sauver les abeilles, avaient décidé d’interdire pour toujours l’usage des pesticides. En particulier l’utilisation d’un produit au nom imprononçable : les néonicotinoïdes.
Une loi fut proposée car les écolos sont influents et les abeilles sont dans leur camp. Et ce qui devait arriver arriva, les néonicotinoïdes furent interdits. Quand le printemps fut venu, le puceron vert du pêcher se trouva fort réjoui, plus d’insecticide face à lui. Enfin libre de se nourrir à sa guise, il dévora les champs de betterave jusqu’à en faire disparaître un sur deux. Quelques saisons suffirent, la filière était à genoux. Il fallait réagir ou périr.
Le gouvernement vient de présenter un projet de loi qui permet de réintroduire l’insecticide néonicotinoïde.
Et de tenter de reconstruire un pan entier de notre agriculture car il y avait péril en la demeure. 45.000 emplois sont menacés et notre souveraineté alimentaire en danger. Plus de sucre de betterave, des importations qui explosent. Un désastre.
Encore une fois, le gouvernement a mis les pouces.
Sauf que les écolos purs et durs ne l’entendent pas ainsi. Cette exception pour la betterave leur paraît annoncer d’autres levées d’interdits. On fustige les reculs du gouvernement, on annonce d’autres menaces sur l’environnement. La révolte gronde, la bataille ne fait que commencer. Le puceron vert du pêcher garde des alliés.
Ce que dit cette fable, c’est que la France tombe dans tous les panneaux. Là où nos voisins européens ont montré du pragmatisme et adapté dès l’origine leur législation, nous avons fait dans le dogmatisme et interdit absolument tous les néonicotinoïdes. Là où nous étions une grande puissance alimentaire, nous avons mis en danger un maillon clef de notre agriculture. Et ce gouvernement qui espère créer 160.000 emplois avec un plan à 100 milliards, était confronté risque d’en laisser disparaître 45.000 dans les territoires. C’est abyssal. On le voit : c’est un grand danger que l’agriculture et l’écologie soient devenues ennemies.
Moralité ?
Pompili un jour, n’est pas Pompili toujours…
C’est Barbara Pompili, lorsqu’elle était Secrétaire d’État à la biodiversité en 2016 qui a défendu la loi d’interdiction totale des néonicotinoïdes. Et c’est la même, devenue ministre de la Transition écologique, qui se retrouve bien obligée aujourd’hui de se dédire. Cette inconstance est une des caractéristiques françaises, avec un cycle immuable : être écolo mais en faire trop ; être fragilisé et reculer. Pourvu que cette fable serve de leçon et en particulier pourvu que tout ce qui sortira de la Convention citoyenne sur le climat ne débouche pas, à la fin, sur autant de dogmes ravageurs.