Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.
Bonjour Nicolas, vous avez aimé la publication cette semaine des chiffres du chômage.
Oui, des chiffres qui concernent l’ensemble de l’année 2018 et qui montrent une forte baisse du niveau du chômage en France. Selon les mesures du BIT (Bureau International du Travail, qui est basé à Genève), le taux de chômage en France s’est établi à 8,8% de la population en âge de travailler, alors qu’il était d’un peu plus de 9% il y a quelques mois.
Alors, je précise qu’on parle bien d’un taux de chômage.
Absolument. Et c’est le seul indicateur valable pour mesurer vraiment le poids du chômage. Un taux de chômage, c’est la proportion des habitants d’un pays qui sont en âge de travailler mais qui n’ont pas d’emploi, et en cherche un. Bien sûr, le nombre total de chômeur est une information capitale, mais se baser sur un taux de chômage, ça permet des comparaisons. Vous allez comprendre. Dans un pays de 100 millions d’habitants en âge de travailler, si on compte 8,8% de chômeurs, ça veut dire qu’il y a...
8,8 millions de chômeurs.
Exact. Mais avec le même taux de chômage dans un pays de 50 millions d’habitants, il n’y aura que...
4,4 millions de chômeurs.
Mais en réalité le poids du chômage sur l’économie de chaque pays sera le même. Donc ce chiffre de 8,8% nous donne des informations fiables, et il nous dit des choses. Il nous dit par exemple que c’est la première fois depuis 10 ans qu’il y a en proportion aussi peu de demandeurs d’emploi en France. La première fois depuis la grande crise financière de ce siècle.
La première fois qu’on repasse en-dessous de la barre des 9%, celle-là même que le pays avait franchi à la hausse sous l’effet de la crise, pour aller fracasser ensuite la barre des 10%. Il nous dit aussi que le chômage recule pour toutes les catégories : les plus jeunes comme les seniors, les hommes comme les femmes, les ouvriers comme les cadres. Au total, ça fait de bonnes nouvelles.
Effectivement. Et je suppose qu’on peut tout aussi valablement comparer notre taux de chômage à celui des autres pays…
Bien sûr. Et là, c’est moins brillant. La moyenne européenne s’établit à 6,6%, et dans les pays de l’Euro, on est à 7,9%. Et je ne parle pas de pays comme les États-Unis où on est au plein emploi avec deux fois moins de chômeurs. Vous voyez qu’il nous reste de la marge, surtout si on se rappelle qu’Emmanuel Macron s’est fixé un objectif (non pas d’inverser la courbe du chômage) mais de descendre à 7% de chômeurs à la fin de son quinquennat.
Et c’est faisable ?
Disons que ce n’est pas infaisable. Ça dépendra en partie de la croissance. Mais ce que je veux souligner, c’est que si c’est la première fois depuis 10 ans qu’on repasse sous les 9% de chômeurs, c’est aussi la première fois qu’il y a aussi peu de dispositifs artificiels de dégonflage des statistiques du chômage : les emplois-jeunes, les emplois-aidés, les stages de formation plus ou moins opportunistes, tous ces artifices, tout ce qu’on appelait le traitement social du chômage qui, en passant coûtait des fortunes.
On ne rêve plus sur les effets du soi-disant partage du travail et sur les 35 heures. Non, on tourne le dos à toutes nos lubies franco-françaises, on se focalise sur la création de vrais emplois. Ouf.