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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il s'interroge sur la demande du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme de l’ONU qui presse la France de recourir aux statistiques ethniques.

Le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme de l’ONU vient de publier un rapport pressant la France de recourir aux statistiques ethniques.

La première réaction, lorsqu’on entend ce genre de déclaration, c’est de se dire : mais de quoi se mêlent-ils, ces "droits-de-l’hommistes", ces donneurs de leçons, ces moralisateurs bien-pensants ? C’est vrai, quoi : la France a une tradition, solidement ancrée, un principe même : pas de statistique ethnique, pas de comptage par race ou par origine, et elle n’entend pas en changer. Sauf que, vu ce que devient notre société, ça mériterait peut-être quand même que l’on s’interroge.

Ce que devient notre société ? C’est-à-dire ?

Nicolas Beytout vous renvoie aux propos d’Emmanuel Macron, dans une interview au magazine "Elle", qui s’inquiète de voir "la société se racialiser progressivement". Dans cette déclaration, le chef de l’État pointe en fait la montée de la cancel culture, ce mouvement qui voudrait effacer de notre histoire les épisodes qui ne sont plus lisibles avec notre regard d’aujourd’hui. Il pointe aussi le phénomène woke qui veut mobiliser, réveiller les consciences contre les inégalités provoquées par la race, mais aussi par le genre ou l’origine sociale. Ces tendances existent, le communautarisme existe, le Président de la République les voient progresser.

Qu’est-ce qu’il propose pour lutter contre la montée de ce phénomène ? 

Un grand principe, l’universalisme républicain. C’est-à-dire l’idée selon laquelle il n’y a pas, dans notre République, de différence entre les individus. Nous sommes tous égaux, « sans distinction d’origine, de race ou de religion » (c’est la Constitution qui l’affirme), ce qui fait dire à Emmanuel Macron qu’il ne se reconnaît pas "dans un combat qui renvoie chacun à son identité ou à son particularisme". Tant mieux. Mais prendre cette posture ne suffit pas, ou ne suffit plus. En appeler aux dogmes républicains est désormais un peu court.

Qu’est-ce que les statistiques ethniques ont à voir avec ça ?

Est-ce qu’on peut lutter efficacement contre un phénomène sans le connaître vraiment, sans le mesurer précisément ? Evidemment non. Pour combattre le racisme et avoir une chance de vider de sa substance tout ce qui nourrit la victimisation de ceux qui se pensent stigmatisés en fonction de leur race, alors on doit absolument connaître la réalité de ces communautés, leur nombre, leur histoire, leur mode de vie. On doit pouvoir mesurer l’écart qui les sépare du citoyen lambda, on doit renoncer à cette fiction selon laquelle ces écarts n’existent pas puisque la République est là. On pourra alors réfléchir en connaissance de cause à des mesures ciblées, pourquoi pas à des quotas, des politiques d’affirmative action, et, puisque les gens ressentent de plus en plus leur différence, la traiter au lieu de la nier.