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Chaque matin, Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Échos, fait le point sur une question d'actualité économique. Aujourd'hui, il revient sur la trajectoire de la City de Londres qui a perdu son statut de première place boursière pour les actions européennes. Nicolas Barré rappelle que le Brexit s'est traduit par un "no deal" pour la finance au Royaume-Uni.

C’est une des conséquences les plus spectaculaire et concrètes du Brexit : la City de Londres a perdu en quelques semaines à peine son statut de première place boursière pour les actions européennes…

"Le journal de la City, le Financial Times, qui en fait sa Une, a du mal à s’en remettre. On le comprend. C’est d’ailleurs l’article le plus lu sur son site : Londres n’est plus la première place boursière européenne. La City, cœur historique de la finance européenne, s’est fait détrôner par Amsterdam. La dégringolade est sévère, rapide, spectaculaire : en janvier, près de la moitié des volumes de transactions sur les actions européennes ont été transférés de Londres vers des Bourses d’Europe continentale, comme Amsterdam, où les volumes ont été multiplié par quatre, mais aussi Paris et Francfort.

C’est la conséquence directe du fait que la finance avait été sortie des négociations sur le Brexit…

En matière financière, le Brexit s’est traduit par un "no deal". Cela veut dire que l’Europe n’a accordé aucune équivalence aux services financiers opérant à Londres pour qu’ils puissent exercer leurs activités sur le continent. La finance a beau peser deux fois plus que la pêche dans l’économie britannique, Londres a renvoyé le sujet à plus tard : Boris Johnson a préféré se battre pour les pêcheurs plutôt que pour les traders...

Mais le résultat, c’est que les acteurs des marchés qui négocient les actions européennes se sont rabattus sur le continent, seule solution pour garder leurs clients. A Londres, on espère que ces capitaux qui ont franchi la Manche reviendront vite. Des discussions sont en cours avec Bruxelles pour trouver enfin un accord en matière de services financiers. Mais les Européens ne sont pas du tout pressés, ils voient même beaucoup d’avantages à engranger ces bénéfices sonnants et trébuchants du Brexit.

Pourtant, on n’imagine pas que la City laisse partir autant d’activités sans réagir…

La City a une stratégie possible face à l’Europe, c’est de jouer à fond la déréglementation. De devenir, selon le mot de Boris Johnson, un "Singapour sur la Tamise". Autrement dit une place financière très accueillante, avec des réglementations plus souples qu’en Europe - il y a de la marge - et même une fiscalité moins lourde - il y a de quoi faire aussi. Le ministre des Finances britannique, Rishi Sunak, qui vient de Goldman Sachs, y travaille. Il a même promis un "big bang" : venez chez nous, les normes sont moins sévères, tel est le crédo.

Reste que ça ne résout pas tout : les clients européens resteront régulés par des instances européennes. Et même si Londres parvient à limiter les dégâts, le Brexit est en train de porter un vrai coup à la domination historique de la City sur la finance européenne."