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À peine 15 jours après l'accord de Brexit, Londres envisage déjà de le contourner en détournant certaines règles sur le droit du travail, notamment celle qui plafonne le temps de travail à 48 heures par semaine. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

Quelques jours seulement après la mise en œuvre du Brexit, Londres réfléchit déjà à s'écarter des règles européennes.

Et précisément, le ministère britannique des Entreprises réfléchirait à revoir certaines règles sur le droit du travail, notamment celle qui plafonne le temps de travail à 48 heures par semaine. Il s'agit d'une directive européenne qui s'applique sur tout le continent. Or, en vertu de l'accord de Brexit, Londres s'est engagé à ne pas "diverger" des règles en vigueur en Europe. Ça a été le point dur des négociations pendant des mois, les Européens disant aux Britanniques "si vous voulez continuer à accéder à notre marché, il faudra accepter nos règles".

Pour qu'il n'y ait pas de concurrence déloyale ?

Exactement, c'est le principe du "level playing field", jouer à armes égales. Or si l'on en croit le Financial Times, qui d'ailleurs s'en inquiète, les plus conservateurs dans l'entourage de Boris Johnson, et le Premier ministre lui-même, étudieraient déjà un détricotage des règles sur le temps de travail pour donner un avantage aux entreprises britanniques. Rien n'est officiel à ce stade. Mais on voit bien la tentation de "tester" la solidité de l'accord de Brexit. Si Londres diverge, alors il est prévu un mécanisme de sanctions : l'Union européenne peut imposer des droits de douane. Pas question en effet que nos entreprises soient pénalisées par rapport à des concurrents britanniques qui seraient soumis à des règles plus souples.

On veut éviter le dumping social à nos portes.

Oui sauf que selon l'accord signé en décembre de haute lutte, pour sanctionner Londres, il faut que Bruxelles prouve que les règles britanniques portent atteinte à la concurrence. Bref, ça peut être compliqué et dégénérer en contentieux. En vérité, les milieux d'affaires britanniques ne sont pas spécialement demandeurs d'un tel assouplissement : le droit du travail outre-Manche est déjà plus souple qu'ailleurs en Europe. Et les entreprises britanniques craignent évidemment que l'Europe ne les sanctionne avec des droits de douane supplémentaires. Mais le fait qu'à peine 15 jours après l'accord de Brexit, Londres envisage déjà de le contourner, augure mal de la suite. Et donne un avant-goût de ce que risque d'être l'après-Brexit : une liste interminable de contentieux entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.