L’Allemagne a donné son feu vert au financement du futur avion de combat européen, qui permet d’engager la première phase du programme Scaf, destiné à concevoir et fabriquer le successeur du Rafale et de l’Eurofighter. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.
Le projet est majeur pour l’avenir de l’industrie aéronautique européenne : l’Allemagne a donné son feu vert au financement du futur avion de combat européen.
Un feu vert crucial et in extremis. C’était le dernier jour de session du parlement allemand ce mercredi avant la pause estivale. Or ensuite, il y aura des législatives en Allemagne et nul ne peut dire si la future majorité soutiendrait ce vaste projet d’avion de combat porté par trois pays, France, Allemagne et Espagne. Ce vote était donc très important. Il permet d’engager la première phase d’un programme destiné à concevoir et fabriquer le successeur du Rafale et de l’Eurofighter. Un projet de cette envergure, ça se prépare aujourd’hui pour avoir un avion de combat opérationnel en 2040. Et ne pas se retrouver dépendants technologiquement des États-Unis.
L’Europe veut être indépendante stratégiquement, mais en pratique, les États ont du mal à se mettre d’accord.
Ce projet que l’on appelle Scaf, pour Système de combat aérien du futur, a été lancé il y a quatre ans par Angela Merkel et Emmanuel Macron. Les Espagnols nous ont rejoint ensuite. Mais c’est seulement aujourd’hui que les États ont sécurisé les 4,5 milliards d’euros nécessaires à la première phase du projet jusqu’en 2027. Les principaux industriels dont Dassault, le maître d’œuvre, mais aussi Airbus ainsi que des groupes allemands et espagnols ne sont pas encore complètement alignés sur les rôles de chacun ni sur les questions très sensibles de propriété intellectuelle. Les compétences en Europe sont là, mais il est difficile de faire travailler tout le monde ensemble.
Et pourtant, les projets ne manquent pas.
En plus de cet avion de combat, les Européens ont un projet de drone capable de surveiller un large théâtre d’opérations pour remplacer le Reaper américain, mais ce projet mené sous leadership allemand avance très lentement. Le projet de char de combat du futur, censé remplacer les chars Leclerc français et Leopard allemands, ne progresse pas plus vite car les industriels n’arrivent pas à se mettre d’accord. C’est typique des difficultés que l’on rencontre en Europe : l’Allemagne pense d’abord en termes de politique industrielle tandis que la France, dont les Armées sont engagées sur le terrain, raisonne davantage en termes de besoins opérationnels. Le feu vert du Parlement allemand au financement du programme d’avion de combat est donc une bonne nouvelle dans ce contexte. Reste maintenant à faire preuve de la même volonté dans les autres programmes. C’est une question d’indépendance stratégique pour l’Europe.