Natacha Polony, La Revue de presse 08.03.2016 1280x640 6:26
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La presse quotidienne revient ce mardi sur le sommet européen qui a eu lieu hier pour tenter de trouver une solution à la crise migratoire.

Ce matin en Une de vos journaux, on vous explique qu’ailleurs, ils font mieux, ils sont plus modernes, bref, eux, les réformes, ils les acceptent :
Libération : réforme du travail : comment font les autres ?
Le Parisien : droit du travail : ces pays qui ont osé la réforme.

Mais on ne va pas se mentir, si la presse nationale a voulu éviter les poncifs, la presse régionale nous gratifie de unes spéciales 8 mars :
En Une du Berry Républicain, vous aurez George Sand et Agnès Sorel.
En Une de L’Yonne Républicaine, ce sera Colette.
En Une de la Dépêche du Midi, Simone de Beauvoir, Françoise Giroud, Simone Veil et sur le même plan, la patronne des Femens.
Et en Une de La Montagne, Nous les femmes. Une fois par an donc.

Migrants

Le Figaro résume la situation : migrants : l’Europe tente de fermer la route des Balkans. "20 mois de déclarations de principe, résume Philippe Gélie, d’invitations lancées à des centaines de milliers de migrants, de solutions inopérantes. Tout cela pour arriver au piteux constat dressé lundi par les dirigeants de l’UE : la porte dérobée doit se fermer pour de bon, condition élémentaire pour qu’une porte officielle puisse s’ouvrir dans les pays qui l’acceptent, selon des modalités et dans des proportions librement consenties. Bref, le droit et la volonté politique doivent l’emporter sur la passivité et le laisser-faire, promus jusqu’ici par une culpabilité européenne hors de propos". Et plus loin, Renaud Girard propose une hypothèse pour expliquer cette paralysie de l’UE. 33.000 fonctionnaires très convenablement payés, des hiérarques qui ne manquent ni d’intelligence ni de culture. Mais "ces hommes et ces femmes, dit-il, ont été aveuglés par la contre-idéologie de la fin de l’histoire, sans même en être conscients. Les êtres humains étaient vus par Bruxelles avant tout comme des consommateurs. Imprégnée d’individualisme, la doxa européenne ne voyait dans les hommes que des êtres économiques. Pour avoir ignoré que les hommes sont des êtres culturels, l’UE s’est interdit de comprendre la grande histoire". Reste donc à jouer sur les mots puisque la journée d’hier a vu la Chancelière allemande refuser que soit écrit dans les conclusions du sommet que la route des Balkans est désormais fermée, alors que François Hollande l’a reconnu. Quand on ne peut agir sur le réel, on se contente de choisir les mots.

Journée de la femme

Donc, vous n’y échapperez pas. Il y en a partout. Le Parisien et l’Humanité donnent la parole à des féministes. Libération et le site Slate évoquent les pires initiatives du jour, comme la soirée animée à Marseille par Jean-Marie Bigard, l’inoubliable auteur du sketch sur Le lâcher de salopes. Et puis il y a cet article de l’Opinion sur un facteur trop souvent oublié d’inégalités. L’impôt calculé par foyer. Parce que le calcul par foyer rend le second salaire moins intéressant. Ce qui incite les femmes à abandonner plus facilement leur travail. On notera aussi dans Le Monde un article sur le combat de femmes musulmanes pour que le CFCM ne soit plus une instance uniquement réservée aux hommes. Et un autre sur la lutte, à la libération, autour du corps des femmes françaises. Celles qui avaient couché avec des Allemands, celles que les GI’s américains avaient fantasmé comme des filles faciles. Celles, donc, que les hommes français ont voulu se réapproprier. Enfin, il y a Causette, qui, au nom du féminisme, consacre son dossier principal au pénis, avec notamment les réflexions de Louise Deville, dragking, et qui explique la découverte que constitue pour ses élèves le fait de glisser du coton à leur entrejambe parce que ce poids nouveau modèle la démarche. Épaules en arrière, attitude de domination…

NKM

Elle est candidate et elle le dit un 8 mars. Et pour faire la différence, elle a cette phrase sublime dans Le Figaro : "Je suis une femme. N’est-ce pas la subversion ultime aujourd’hui ?" Elle ajoute : "On a toujours aimé brûler les sorcières dans ce pays". D’ailleurs, le journal consacre, un peu plus loin, un article à une magnifique exposition sur les sorcières à Bruges. Où l’on voit que tout cela est nettement plus subversif qu’une candidature de NKM à une primaire de droite.

Jambon-beurre

Les pages économiques du Figaro nous apprennent l’étonnante flambée du prix du jambon-beurre : +3,6% l’an passé, quand l’inflation est quasi-nulle. Et c’est dans les villes de moins de 50.000 habitants, mais surtout dans les hypermarchés, 15,6%, que la hausse est la plus élevée. Bref, pas sûr que l’amélioration de la qualité que plaident les professionnels soit la principale explication.

Athée en terre d’Islam

C’est un magnifique reportage de Philosophie Magazine sur ces jeunes gens qui, au Maroc, découvrent tout à coup qu’ils ne partagent plus le dogme. Les doutes qu’on essaye d’étouffer, une sexualité différente qui fait craindre la mise au ban, parfois la tentation du suicide, ceux qui trouvent la réponse dans la science et la lecture de Darwin, ceux qui attendent l’indépendance financière pour annoncer leur homosexualité à leur famille ou ceux qui découvrent qu’ils ne sont pas si seuls et que beaucoup, sans oser le dire, ont suivi le chemin vers l’athéisme.

 

 

C’est aussi dans Philosophie Magazine qu’on trouve cette question : pourquoi sautons-nous en parachute ? Et la réponse de quatre philosophes. Pour mieux connaître ce que peut un corps, nous dit Spinoza, sa puissance d’agir. Parce que ce qui ne me tue pas me fortifie, selon Nietzsche. Pour vaincre le vertige de la liberté, nous dit Sartre. Mais c’est Marcuse qui nous donne la clé : la société industrielle est caractérisée par les faux besoins qui nous privent de la possibilité de nous attacher aux choses et aux êtres. Pour nous sentir exister, nous sommes conduits à des impulsions défiant toute utilité. Nous cherchons des sensations fortes qui perdront en intensité et qu’il faudra remplacer par d’autres encore plus fortes. Alors, on a le choix : surenchère au saut en parachute, ou vrai jambon beurre pour redécouvrir les sensations essentielles.