Au lendemain du Brexit, David Cameron apparaît comme le grand perdant d'un pari trop risqué.
David Cameron, l'homme par qui le Brexit est arrivé. Ce Premier ministre conservateur qui aura réussi à provoquer la sortie de son pays de l'Union européenne alors qu'il voulait l'y maintenir...
David Cameron a joué les apprentis sorciers, il en a tiré les conséquences et a démissionné. Aux côtés de son épouse il a déclaré d'un ton grave : "Je ne crois pas qu'il soit opportun que je sois le capitaine qui mène notre pays vers notre prochaine destination." Digne mais réaliste. Certes quelques heures plus tôt des députés de son parti lui demandaient de rester. Il évoquait lui-même cette possibilité il y a plusieurs mois en prétextant qu'il n'était pas un "lâcheur." Mais devant l'ampleur du vote "out" et la participation exceptionnelle ne lui offraient pas d'autre choix que ce "out" personnel.
Était-il profondément européen ?
Vous avez raison de poser cette question parce que David Cameron était un eurosceptique plus par calcul que par conviction. Il est celui qui a ramené les conservateurs au pouvoir après 13 années d'opposition. 5 ans plus tôt il avait été élu à la tête du parti grâce aux soutiens des plus anti-européens des Torries. Ce parti-là se donnait alors pour chef non pas une fille d'épicier comme Margaret Thatcher, mais un descendant de Guillaume IV et diplômé d'Oxford avec un physique sorti tout droit de la série Downton Abbey. Vous savez ces gens qui prennent des bains depuis des générations, comme disait Françoise Giroud. Un grand type au teint rose, avec un visage poupin mais au traits fins et beaucoup d'allure. Au départ Cameron aurait voulu donner un nouveau souffle à son parti en demandant à ses barrons d'arrêter de ressasser la question de l'Europe. Mais il avait dû donner des gages en faisant démissionner les 27 députés européens du groupe PPE, ce qui avait été un mauvais calcul car depuis les Torries ont perdu toute influence au parlement européen.
Donc David Cameron a toujours été prisonnier des anti-européens de son parti ?
Oui les eurosceptiques n'ont cessé de multiplier les rébellions parlementaires. Vous savez qu'une centaine d'entre eux avaient déposé en 2011 des amendement réclamant un référendum. En janvier 2013 David Cameron avait cédé en leur promettant d'en organiser un, afin de s'attirer leur soutien. Il pensait qu'il allait régler ce différend pour toujours alors que d'autres parlaient de suicide politique. Mais en 2015, les Torries gagnaient la majorité absolue grâce à Cameron. Entre temps la question empoisonnée de l'Europe se mêlait avec celle encore plus toxique de l'immigration. Le pari devenait encore plus risqué...
Un pari finalement perdu !
Oui ! Cameron va rester dans l'Histoire comme celui ayant sorti son pays de l'Europe après 43 ans de relations, il est vrai, assez compliquées. Mais il sera aussi peut-être celui qui aura conspiré à la dislocation du Royaume-Uni si jamais l'Ecosse qui a voté pour le "In" se sentait de nouvelles velléités d'indépendance. Le vote anglais est une cassure entre les élites et le peuple, entre le centre des villes et les zones rurales mais surtout entre les jeunes et les plus âgés. Ce n'est pas le chômage qui est en cause. Cette année encore l'emploi a progressé de 400 000, dont 80% sont des créations de postes à plein temps. C'est bien la peur des immigrés et les imprudences d'Angela Merkel qui se sont révélées déterminantes pour ce "out."