Chaque dimanche matin, Roland Perez nous donne les clés pour comprendre quels sont nos droits au quotidien.
En 1986 le couple à la scène et à la ville, les Rita Mitsouko, chantait ce refrain, le tube devrais-je dire, "Les histoires d’amour finissent mal ... en général". Et il est vrai que cette rengaine illustre parfaitement la question de droit posée ce matin : les mariages célébrés à Las Vegas, ont-ils valeur légale ? La Cour de cassation vient d’y répondre. Rappelez-nous peut être, les circonstances de l’affaire qui lui a été soumise ?
L’histoire est à mon sens savoureuse : elle met en scène un avocat en instance de divorce qui découvre, alors que son épouse lui réclame une prestation compensatoire confortable, que cette dernière avant de l’épouser s’était mariée quelques temps auparavant, à las Vegas, mariage qui ne s’était pas soldé par un divorce dans les règles. Il prétendait ainsi être bigame, ce qui est interdit en France. Du coup au lieu de divorcer, il demandait l’annulation de son propre mariage, ce qui aurait eu pour conséquence de n’avoir à régler finalement, aucune prestation compensatoire à Madame
Et qu’a répondu l’épouse concernée ?
Elle était évidemment choquée. Car ce mariage express célébré dans le Nevada s’était déroulé 14 ans avant son second mariage, que comme beaucoup de ces mariages célébrés de façon folklorique la plupart du temps, il avait été décidé sur un coup de tête, en 10 minutes, que c’était un simple jeu sans conséquences juridique. D’ailleurs, les bancs n’avaient jamais été publiés et aucune transcription n’avait été faite sur les registres de l’état civil en France via le consulat français dans le Nevada. En d’autres termes, ce mariage n’avait aucune valeur légale selon elle.
Et qu’a répondu la Cour de cassation ?
Elle confirme la décision de la cour d’appel qui explique que pour se marier à las Vegas il faut juste respecter les règles de forme imposées par l’état du Nevada. En l’occurrence, le mariage avait bien été enregistré sur place. Le second mari en avait obtenu une copie des autorités américaines et l’absence de publication des bans empêchait juste la transcription du mariage en France. En revanche, et c’est là où cela devient très intéressant, la cour s’est penchée sur ce qu’on appelle en droit : l’intention matrimoniale.
Les époux avaient-ils vraiment voulus se marier, ou était ce juste un jeu, le temps de leur séjour dans l’ouest américain ? Une foule de détails fournis à la cour penchait plus vers l’anecdote, le jeu, le symbole plus que l’intention réelle. Si bien que la cour a conclu que le mariage célébré dans ces conditions à las Vegas, n’était pas valable.
Mais si je vous suis bien Roland, cette décision de la Cour de cassation, ne vaut pas pour tous les mariages célébrés à las Vegas ?
Vous avez raison de le souligner, toutefois il est vrai que pour bon nombre d’unions célébrées à Las Vegas, on peut se poser la question du consentement des époux. N’y a-t-il pas juste la volonté de sacrifier au rite de mariage, le jeu de l’amour et du hasard ? En tout cas d’un point de vue strictement légal, sachez que 24 heures après un "very bad trip" à Las Vegas, les époux peuvent demander sans difficulté l’annulation, c’est prévu sur place. Le mariage reste néanmoins valable, retranscrit ou non, en France, sauf à prouver qu'il s’est fait sans volonté réelle de s’unir, mais pour s’amuser ou pour satisfaire des intérêts financiers ou administratifs du genre obtention d’un titre de séjour.
Merci et à la semaine prochaine