Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Une menace de grève à la SNCF ( encore une) Cette fois, elle pèse sur le pont du 8 mai. Le syndicat SUD Rail a appelé contrôleurs et conducteurs à débrayer pour dénoncer leurs conditions de travail.
Sud Rail, c'est le troisième syndicat en importance à la SNCF. Il a déposé samedi un préavis de grève pour un des ponts de mai, et il appelle les cheminots roulants à cesser le travail, selon les catégories de personnel, entre le 7 et le 11 mai, espérant rendre difficiles autant les départs que les retour. La raison selon le syndicat ? Des plannings mal gérés qui changent du jour au lendemain et une revendication financière. Sud réclame une augmentation de 100 euros par mois de la prime de travail.
C'est un peu gonflé.
Je vais passer sur les questions d'organisation et de planning. Un souci qui devrait se régler au sein de chaque établissement de la SNCF et qui ne devrait jamais, au grand jamais, affecter le public. C'est le prétexte le plus tiré par les cheveux qu'on puisse imaginer.
Je vais aussi passer sur le fait de faire grève pour réclamer une prime de travail. Dans une entreprise qui depuis sa création en 1947 n'a pas passé une année sans grève, c'est croquignolet. C'est en fait indécent. Les cheminots ont obtenu en moyenne 6% d'augmentation en 2023 ; 4.6% en 2024, année marquée par des prmies JO de 100 euros par jour travaillé. Et encore 2,2 % en moyenne en 2025. Tout ça, ça a fait plus que compenser l'inflation. Et les autres syndicats saluent, de leur côté, le dialogue social très constructif a la SNCF, où des accords sociaux ont été signés ces derniers mois, sur les fins de carrière, par exemple
C'est quoi, le vrai sens de cette grève ?
Le patron de la SNCF, Jean-Pierre Farrandou, arrive au terme de son mandat. Il sera remplacé dans le courant de ce printemps. Sud Rail est simplement en train de montrer ses muscles. De montrer à ses adhérents qu'il existe et de lancer un avertissement à un patron à venir dont on ne connaît même pas encore le nom. Voilà ce qui justifie de compliquer la vie de millions de français.
Pas très responsable.
Non. La SNCF dit avoir bon espoir d'éviter la grève par le dialogue social. Le problème, c'est que Sud Rail est puissant chez les contrôleurs et qu'un train ne part pas sans contrôleur. Mais effectivement, une grève à la SNCF, c'est dommageable. Et ça l'est de plus en plus. D'abord, parce que la SNCF est maintenant une société qui a de la concurrence sur les rails. Pour l'heure, sur l'axe Paris-Lyon -Milan avec Trenitalia... Sur Lyon - Barcelone et Marseille -Madrid par la Renfe, la compagnie nationale espagnole. Et c'est vraiment tentant d'aller voir ailleurs si on planifie un voyage et qu'on n'est pas sûr que les trains SNCF partiront. Mais la vraie concurrence, ça reste l'avion. La bonne volonté d'éviter des émissions de carbone a ses limites. Si le principal pourvoyeur de voyages décarboné n'est pas fiable, les voyageurs font sans.
C'est la partie émergée de l'iceberg des dégâts des grèves à répétition
Les grèves récurrentes de la SNCF n'affectent pas que les voyageurs. Elles affectent les comptes de l'entreprise et sa capacité à investir - dans le réseau, par exemple, qui en a pourtant bien besoin. Elles affectent aussi le fret ferroviaire, pour lequel la France est très très en retard par rapport à ses voisins, alors que c'est un levier très important pour réduire le bilan carbone du transport, un des secteurs les plus carbonés à cause de la route. Des trains pas fiables, ce sont des clients qui préfèrent les camions. Les grèves à répétition les dissuadent de changer leurs pratiques. Mais quelle importance cela peut-il avoir face aux terribles problèmes de planning du syndicat Sud Rail ?