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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Ce matin, le sabotage d’une voie ferrée dans le Sud-Ouest, dont la justification laisse songeur : il s’agit de protester contre la construction de l’Autoroute A69. Histoire en apparence loufoque, mais qui ne l’est pas.

Le 29 février, la circulation des trains a été interrompue une partie de la journée entre Castelnaudary dans l’Aude et Toulouse : un incendie volontaire a endommagé la voie. Des milliers de voyageurs en rade. Sabotage revendiqué dans un blog d’extrême gauche local.

"Sabotage” ? Ce n’est pas un peu fort ?

“Sabotage du chemin de fer Toulouse –Narbonne contre l’A69”, c’est bien le titre du communiqué évidemment non signé paru sur un site “Information Anti Autoritaire Toulouse et Alentours”. Anti-autoritaire, c’est délicieusement ironique quand on se balade sur ce fanzine, qui recense tout ce qui se fait d'actions violentes et désobéissance civile qui dérape. Il faut lire ce communiqué, parce que vraiment, saboter un train pour protester contre une autoroute, ça confine au génie...

Alors ? Quelle logique y a-t-il dans tout cela ?

 On a affaire à des gens qui ont découvert le grand complot caché: “La SNCF suit la volonté de l’état néolibéral et délaisse de plus en plus le système du Fret, pour favoriser le transport routier de marchandise.” Salaud de train, allié objectif des camions. Tout ça n’a ni queue ni tête. Le plan stratégique et de l’Etat et de la SNCF est de doubler la part modale du fret ferroviaire d’ici à 2030, justement pour diminuer les circulations routières. Mais on ne s’embarrasse pas trop de faits dans ces milieux militants.

On peine à suivre...

On aurait tort de s’en arrêter à l’apparente absurdité du mode d’action. Le texte livre un scénario. Les saboteurs anonymes l‘écrivent noir sur blanc : “le train et du Fret font parti du même système industriel, oppresseur et dévastateur. Nous dirons finalement que peu importe si les déchets nucléaire et de l’armement sont transportés par train ou camion, c’est par les flux que ce système fonctionne.”

On a les vieilles obsessions des anticapitalistes antisystèmes : jouer les coucous dans une lutte, n’importe laquelle, parfois les bassine, l’autoroute. Y faire son nid, y couver le grand dessein de destruction du système.

Il faut s’inquiéter ?

Oui. Parce que les prochains sabotages sont annoncés : “le chantier de la LGV Bordeaux-Toulouse”, en premier lieu. Ca ira bien au-delà, tout est écrit au fil des articles. Les récents coups de poing contre les cimenteries, les systèmes électriques industriels de la région grenobloise, l’usine Arkema la semaine passée, sont les symptômes d’un mal qui monte. Il a les oripeaux de la militance écologiste, qu’il vampirise. Il surfe sur l’écoanxiété pour radicaliser. Il nourrit des saboteurs  qui pensent que tous les coups sont permis contre un système capitaliste qu’ils vomissent. J’ai recueilli, ces derniers temps, des témoignages dans plusieurs entreprises, menacées de sabotages. On y redoute les blessés et pire, les morts.