Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Les restaurateurs ne sont pas contents. L’argent des Titres restaurant leur échappe.
En août 2022, en pleine poussée d’inflation, le Gouvernement avait choisi de libérer du pouvoir d’achat en autorisant les salariés qui bénéficient de Titres restaurants, ils sont 4 millions en France, à les utiliser pour faire les courses. Plus seulement pour acheter des sandwich triangles, mais tous les biens alimentaires qui peuvent servir à la préparation d’un repas.
Et ça a extrêmement bien marché... La part des titres restaurants utilisés dans la grande distribution, c’est maintenant près d’un tiers ! Si on met de côté ce qui est dépensé chez les traiteurs, ou dans les boulangeries, on s’aperçoit que seulement quatre titre restaurants sur 10 sont effectivement utilisés dans un restaurant.
Et donc les restaurateurs voudraient qu’on revienne à l’ancien système.
Le dispositif d’élargissement des usages des Titres restaurants devait durer d’abord jusqu’à fin 2023, il a été prolongé jusqu’en décembre 2024. La date approche, et donc, les syndicats de restaurateurs s’agitent. Marre qu’on leur ôte le pain de la bouche. Ils parlent de “ ticket caddie”
Il y a beaucoup d’argent en jeu ?
Oui ! Les Titres Restaurant, c’est environ six milliards d’euros. Mais en fait c’est 8 milliards déversés dans l’économie, si on compte l’effet multiplicateur, c’est à dire, ce que les consommateurs doivent rajouter pour compléter le prix du repas, notamment au restaurant.
Les restaurateurs estiment que l’arrivée de la grande distribution leur a fait perdre 576 millions en un an. Et ils expliquent qu’ils ont les prêts du covid à rembourser, et qu’il faut les soutenir.... en leur rendant la clientèle captive des Titres-Restaurant.
Alors est-ce qu’il faut revenir en arrière? Réserver les Titres repas à la restauration ou aux commerces de bouche ?
L’expérience prouve que non. Ca va être difficile de revenir en arrière... Si ça marche aussi bien en grande distribution, c’est que ça répond à un réel besoin des Français. Les Titres restaurant sont plus “rentables” pour nombre de familles quand ils servent à acheter des produits bruts qu’un seul repas tout fait.
Peut-être qu’il faut réfléchir à tout le système ?
Ca va être compliqué, parce qu’il fait vivre beaucoup d’intermédiaires et que c’est devenu une rente... mais oui, la grogne corporatiste des restaurateurs ouvre pas mal de réflexions. Le Titre restaurant, c’est un avantage social, mais c’est aussi une liberté contrainte, par la somme plafonnée, par le fait qu’on ne peut pas les dépenser le dimanche, par le fait qu’il n’est pas accepté partout... Est-ce qu'on doit en plus accepter que le dispositif, déjà contraint, soit en plus préempté pour subventionner la restauration, avec le concours involontaire mais obligatoire des salariés et au détriment de leur liberté de choix ?