Napoléon s'est longtemps rêvé écrivain. Il a rédigé plusieurs essais et notamment un torride roman d'amour intitulé : "Eugénie et Clisson", écrit à l'été 1795. Alors quand, quelques mois plus tard, au lendemain de sa première nuit d'amour avec Joséphine, il prend la plume, écrire de brulants mots d'amour est un exercice auquel il est rompu et pour lequel il a, par ailleurs, un talent hors du commun : il sait sublimer l'amour. Ses lettres à Joséphine sont parmi les plus belles jamais écrites, en langue française. Les célèbres lettres d'amour de Napoléon à Joséphine viennent d’être rééditées aux éditions Le Passeur. Le titre est une phrase extraite d'une des lettres de Napoléon : "Vivre par Joséphine, voila l'histoire de ma vie".
« Reçois un millier de baisers mais ne m’en donne pas car ils brûlent mon sang », écrit Napoléon dans une première lettre à Joséphine. Elle va en recevoir des dizaines d’autres, il écrit tous les jours. « Le sommeil me console, il te place à mes côtés », lui dit-il aussi dans une autre lettre, « Je lis tes lettres comme on dévore, après six heures de chasse, un mets qu’on aime ».
On ignore ce que Joséphine lui répondait à l’époque car on possède moins d’une dizaine de lettres écrites de sa main. On pense que Napoléon les a peut-être brûlées lors de l’une de ses terribles crises de jalousie, qui étaient souvent un peu justifiées. On se doute toutefois que les lettres de Joséphine n’avaient rien du caractère passionné de celles écrites par son époux.
Une relation déséquilibrée au début
En effet, ce qui caractérise cette correspondance, c’est le déséquilibre. Joséphine est assez indifférente, infidèle durant la campagne d’Italie (lui l’est en Egypte), et le contenu des missives de Napoléon reflète bien ce déséquilibre. « Ta dernière lettre est froide comme l’amitié », lui écrit-il un jour.
" Je t’écris, ma bonne amie, bien souvent, et toi bien peu. J’arrive à Milan, je me précipite dans ton appartement, j’ai tout quitté pour te voir et te presser dans mes bras, tu n’y étais pas. Tu cours les villes avec des fêtes, tu t’éloignes de moi lorsque j’arrive, tu ne te soucies plus de ton cher Napoléon. Un caprice te l’a fait aimer, l’inconstance te le rend indifférent. "
Napoléon est complètement subjugué par Joséphine. D’abord, il la trouve particulièrement douée sous les draps. D’elle, il écrit : « Elle était pleine de grâce, au lit comme ailleurs ». Il faut dire que c’est une femme expérimentée, elle a déjà été mariée à Alexandre de Beauharnais, un libertin notoire qui a probablement servi de modèle au vicomte de Valmont, dans les Liaisons Dangereuses de Laclos. On peut en juger d’après le caractère érotique des lettres de Bonaparte depuis l’Italie : « Baisers à la bouche, aux yeux, sur l’épaule, au sein, partout, partout ».
Au début de leur mariage, Joséphine reçoit des lettres de son nouvel époux quasiment tous les jours. C’est d’ailleurs ce qui lui fait dire à son amie, Madame Tallien : « Mon mari ne m’aime pas, il m’adore. Je crois qu’il deviendra fou ».
Un attachement sincère
Avec le temps, la tonalité de la correspondance change entre les deux époux. Au début, Napoléon est un écrivain enthousiaste. Après sept ans de mariage, l’équilibre s’inverse, c’est à présent Joséphine qui est demandeuse, craignant que son mari ne la quitte. Elle lui écrit : « Je veux toujours être à tes yeux la bonne, la tendre Joséphine, occupée uniquement à ton bonheur ». Elle s’est attachée à lui.
De son côté, Napoléon se détache de plus en plus, parfois à son corps défendant. Son idée la plus pressante est le besoin de fonder une dynastie et le couple n’a malheureusement pas d’enfant. Même après le divorce et son remariage, il lui témoigne toujours son affection et ses attentions, il reste plein d’égards pour elle. Les dames d’honneur de Joséphine témoignent qu’à la Malmaison, demeure de l’impératrice, Napoléon lui donnait régulièrement des tapes affectueuses en l’appelant « Ma grosse bête ».
Le divorce ne change pas leur attachement sincère et leurs relations restent empruntes de tendresse et d’amitié. La dernière lettre de Napoléon à Joséphine date du 16 avril 1814. Il s’apprête à être exilé sur l’île d’Elbe et se doute qu’il ne la reverra jamais. Il a raison : à son retour d’Elbe, avant les Cent-Jours, elle est morte. Dans son ultime missive, il écrit :
" Adieu, ma chère Joséphine, résignez-vous ainsi que moi, et ne perdez jamais le souvenir de celui qui ne vous a jamais oubliée et ne vous oubliera jamais. "
Retrouvez notre série Dans l'intimité de Napoléon :
1/5 - Les lettres d'amour de Napoléon à Joséphine
2/5 - Les petites manies de Napoléon
3/5 - La redingote et le chapeau