3:04
  • Copié
SAISON 2017 - 2018

Chaque matin, Marion Sauveur nous parle d'alimentation, de "mieux manger", de solutions concrètes pour changer ce qu'il y a dans notre assiette.

Tout de suite on regarde ce qu’il y a dans votre assiette Marion et ce matin, il y a du camembert. Les producteurs de fromages au lait cru et les industriels vont enterrer la hache de guerre au sujet de l’appellation Camembert de Normandie.

Et oui Raphaëlle. En 2021, vous trouverez dans vos rayons du Camembert de Normandie, du Véritable Camembert de Normandie mais plus de Camembert Fabriqué en Normandie. Vous êtes perdus ? Il y a de quoi. Ce résultat est le fruit d’intenses négociations, après plus de 10 ans de conflit entre les producteurs de camembert au lait cru et les industriels. Tout a commencé en 2007, quand les industriels qui jusque-là se pliaient aux exigences de l’AOP (appellation d’origine protégée), ont décidé d’en sortir.

Parmi ces industriels, il y a notamment le géant Lactalis, qui a défrayé la chronique récemment, et dont vous connaissez les camemberts Président, Bridel ou encore Lepetit. S’ils ont décidé de quitter l’AOP, c’est qu’ils ne voulaient plus respecter à la lettre le cahier des charges très strict ! Leur souhait ? Pouvoir notamment fabriquer du camembert avec du lait pasteurisé. Ils apposent alors sur leurs fromages la mention "Fabriqué en Normandie"

Il y a donc un camembert de Normandie et un camembert fabriqué en Normandie ?

Et oui et c’est trompeur. Le camembert de Normandie est celui qui est labellisé AOP. Il est constitué de lait cru provenant à 50% de vaches locales, et qui ont passé plus de six mois de l'année dans les prés. Ce camembert AOP est fabriqué selon des critères précis. Le lait cru n’est jamais chauffé à plus de 40 degrés et il est déposé en cinq fois à la louche, dans le moule. 

Les camemberts "Fabriqués en Normandie", les industriels ne sont pas forcément fabriqués avec du lait de Normandie. Il peut venir de n'importe où et simplement être transformé dans une usine normande. Il peut aussi être pasteurisé et donc chauffé à plus de 60 degrés.

Comment on fait le camembert ?

Pour faire un fromage, il faut un peu plus de 2 litres de lait. Traditionnellement, on le dépose en 5 fois à la louche, dans le moule, une louche doit être versée à intervalle régulier toutes les 45 minutes environ, ce qui promet au fromage souplesse et onctuosité. Les fromages sont retournés une seule fois et sont recouverts d’une plaque métallique qui exerce une légère pression. Il faut compter 30 à 35 jours pour avoir un fromage "fait à cœur".

Cette recette aurait, selon la légende, été mise au point par Marie Harel, une habitante du village de Camembert, dans l’Orne. En 1791, la trentenaire aurait hébergé un prêtre réfractaire fuyant la révolution française et qui maîtrisait parfaitement la recette du Brie. Il lui a transmis son savoir-faire et elle, l’aurait perfectionné pour donner naissance à ce fameux fromage rond que l’on connaît aujourd’hui dans sa boite à camembert, en épicéa.

Maintenant que les producteurs de fromages au lait cru et les industriels se sont mis d’accord. Qu’est-ce que ça va changer ?

D’abord, la dénomination "fabriqué en Normandie" va disparaître. Deux appellations AOP vont voir le jour : “Camembert de Normandie” et "Véritable Camembert de Normandie".

Le "Camembert de Normandie" sera une version bas de gamme de l’AOP, avec des conditions assouplies par rapport à aujourd’hui. Pour obtenir ce label, il faudra produire du lait avec au moins 30% de vaches de race normande contre 50% aujourd’hui ; les bêtes devront pâturer au moins 6 mois. Et le lait pourra être pasteurisé, seul le lait cru était autorisé jusqu’à maintenant. L’appellation "Véritable Camembert de Normandie" va remplacer l’actuel label AOP, et même monter en gamme. Les fromages seront réalisés avec du lait cru issu de 70% de vaches normandes contre 50% actuellement.

Le camembert sera donc de moins bonne qualité ?

C’est le risque. Même si les vaches normandes devraient être plus nombreuses dans les prés normands. Dans la grande distribution, qui représente 95% des ventes, il risque d’il n’y avoir qu’un seul camembert AOP référencé, le moins cher, le pasteurisé.