Chaque samedi, Bernard Poirette vous fait découvrir ses coups de cœur en matière de polar.
"Alors, dit la Bible, l’Eternel fit pleuvoir du ciel sur Sodome et Gomhorre du soufre et du feu. Il détruisit ces villes et tous les habitants". Fin juillet 1943, les bombardiers britanniques Lancaster de l’opération Gomorrhe rasent Hambourg en une semaine. 45000 morts ; que des civils. Cinq ans plus tard, dans les ruines d’un immeuble effondré, on retrouve des sculptures et un cadavre. Des sculptures sans doute cachées pour échapper à la traque nazie de "l’art dégénéré". Quant au cadavre, il n’en reste presque rien : une chaussure de pied bot et un morceau d’étoile jaune. L’affaire intéresse deux services de police. La criminelle bien sûr et son inspecteur principal Donnecke, ancien gestapiste bizarrement blanchi en 1945. Pour lui, le mort de l’immeuble a été tué dans les bombardements. Il veut classer au plus vite.
Elle intéresse aussi l’office de lutte contre le marché noir, florissant dans cette Allemagne détruite et affamée. Car les statues retrouvées ne sont pas sans valeur, loin de là. L’inspecteur Franck Stave, ancien de la criminelle et ennemi juré de Donnecke, va donc lui, mener une vraie enquête. Cette enquête est absolument passionnante car elle a comme toile de fond une ville et un pays à un moment extra-ordinaire de leur histoire. Les Anglais occupent tout le nord de l’Allemagne, les anciens nazis sont partout, il n’y a plus d’économie, les magasins sont vides, le Reichsmark ne vaut plus rien et d’un jour à l’autre, le Deutschemark, fabriqué aux Etats Unis, va remplacer l’ancienne monnaie qui devait "durer 1.000 ans". Dans ce monde effondré, le policier Franck Stave, tenace et implacable, enquête. Et c’est génial.
Si comme moi vous aimez les grands romans policiers historiques, ce samedi est un jour béni car vous allez vous procurer « le faussaire de Hambourg », de Cay Rademacher. A la porte de chez vous, vous allez accrocher "ne pas déranger". Et dans quelques heures, vous émergerez, enchantés et ravis d’avoir découvert un nouveau grand du polar, du calibre selon moi de l’immense Philip Kerr. Quel bonheur ! "Le faussaire de Hambourg", de Cay Rademacher, est paru aux éditions du Masque.