Chaque matin, Yves Thréard nouslivre son analyse politique à quelques semaines de l'élection présidentielle.
François Fillon sera donc le candidat du bruit et de la fureur.
On pensait que le tonnerre de critiques qui s’était abattu sur lui depuis la primaire de la droite lui ferait mettre de l’eau dans son vin. Eh bien, pas du tout, Fillon persiste.
"Moi, je veux changer les choses. J’ai un programme économique radical que je mettrai en œuvre", a-t-il insisté hier en visitant un centre Emmaüs à Paris.
C’est clair et net : pour Fillon, le fameux modèle social français protège moins aujourd’hui qu’il ne créé du chômage, de la pauvreté et de l’endettement public.
Autrement dit, le rapport qualité-prix n’est plus au rendez-vous : le modèle est cassé.
Avec Fillon, ce ne serait donc ni le conservatisme ni la tradition (mots qu’on veut lui coller à la peau et qui ont mauvaise presse) mais avec Fillon, ce serait la révolution.
Tiens, le titre du livre de Macron. Un mot plutôt de gauche, tout comme celui de "radical" d’ailleurs. Avant 1917, Lénine disait : que faire ? Fillon dit en 2017 : je veux faire !
Peut-il tenir sur ce registre dur alors que, même dans son camp, certains s’inquiètent ?
Et qu’ailleurs, on a abandonné cette stratégie offensive et quasi belliqueuse.
Mélenchon ne veut plus être le candidat du bruit et de la fureur, qui veut tout casser, sortir les sortants. Au contraire, il cherche à rassembler pour attirer les déçus d’un PS usé.
Marine Le Pen est partie en campagne avec le slogan de la "France apaisée". Son programme économique est ultra protecteur. Pas question de toucher aux 35 heures, ni aux retraites.
Fillon veut les ringardiser en les accusant d’immobilisme, de passéisme, pour, lui, être le candidat du mouvement, celui qui donne le tempo à la campagne et autour de qui tous les débats s’organisent.
Il y a du Sarkozy dans cette méthode.
Méthode qui n’a pas toujours souri à Sarkozy précisément.
Oui, mais la constance est plus grande et le style radicalement différent. Regardez, hier soir au journal de 20 heures de TF1, Fillon affiche désormais sa détermination avec le sourire, comme Macron, l’autre adversaire qu’il redoute.
Fillon ne veut plus laisser à Macron le privilège d’incarner l’anti système, la dénonciation de ce qui ne marche plus pour les Français. Fillon - Macron, la bataille s’annonce rude sur le champ de l’audace réaliste.