Chaque jour, la matinale d'Europe 1 revient sur l'un des événements sportifs qui fait l'actualité. Mardi, Virginie Phulpin s'intéresse à un enjeu majeur dans le sport : la santé mentale.
C’est l’édito sport de Virginie Phulpin. On reparle de la santé mentale des sportifs. L’actualité nous montre que c’est bien un des enjeux majeurs dans le sport d’aujourd’hui.
L’image date du week-end. Sur un court de tennis à Indian Wells. Naomi Osaka est en larmes, après l’insulte d’une spectatrice à son encontre. La joueuse a pris le micro en fin de match pour expliquer qu’elle en avait entendu d’autres dans sa carrière, mais que là, elle avait craqué. Parce que ça peut arriver. On sait que Naomi Osaka est fragile psychologiquement, la saison dernière elle s’était arrêtée pendant trois mois pour tenter de reprendre le dessus. Mais là, ce qui est important, c’est qu’elle ait choisi de parler de son mal-être devant le public. C’est fondamental pour elle, pour qu’elle se libère, mais aussi pour les spectateurs qui doivent entendre les humains derrière les champions. Je pense aussi à Neymar et Lionel Messi. On a beaucoup parlé des quolibets essuyés par les joueurs du PSG dimanche. Les supporters ont le droit d’être en colère. Mais on peut aussi s’arrêter deux secondes sur ce que les joueurs peuvent ressentir. Thierry Henry disait dans l’Equipe il y a une semaine à propos de Neymar "est-ce que quelqu’un lui a déjà demandé comment il allait" ? Ça va ? Ca reste une question taboue dans le sport. Surtout la réponse. Un sportif va forcément bien. Il est payé pour faire du sport, on ne va pas le plaindre.
Alors qu’en fait la dépression concerne beaucoup de sportifs
Rares sont ceux qui n’en ont jamais été victimes dans leur carrière. Encore plus avec la pandémie. Les sportifs se consacrent souvent uniquement à leur sport, et ce depuis leur plus jeune âge. Donc quand ils sont en échec, ils peuvent voir ça comme l’échec d’une vie, et pas seulement d’une carrière ou d’un moment de leur carrière. C’est violent. Et cette pression n’est pas là qu’au moment des échecs. Les athlètes paralympiques français rentrent de Pékin aujourd’hui. Ils ont connu de grands succès. Mais remporter des médailles, ça peut être très compliqué à gérer mentalement aussi. Il y a un contrecoup, une impression de vide devant soi après une compétition qui n’a lieu que tous les 4 ans. Michael Phelps, le nageur américain multimédaillé, a parlé de sa dépression post-olympique. Et puis dans les sports d’équipe, celui qui ne va pas bien n’ose pas le dire, n’ose pas s’arrêter pour ne pas laisser tomber les autres. C’est ce qu’a dit dans un témoignage bouleversant à Canal Plus l’épouse de Jordan Michallet, ce joueur de rugby qui a mis fin à ses jours il y a quelques semaines. Les clubs, les fédés, sont en train de réaliser l’importance de la santé mentale des sportifs. Il y a des choses qui se mettent en place, comme des évaluations psychologiques au cours d’une carrière. On est au début du chemin. Mais entendre des témoignages comme ceux-là va aider. Qu’on en parle aussi, nous, qui commentons ou qui regardons le sport, et le tabou finira par ne plus en être un.