Pendant l'été, chaque week-end, Laure Dautriche vous raconte l'histoire d'un chef-d'œuvre qui a été créé pendant un été. Ce dimanche, "Quintette avec clarinette" de Brahms.
Les chefs-d'œuvre de l'été, aujourd'hui, une œuvre de Brahms, le célèbre Quintette avec clarinette, composé pendant l'été 1891.
En cette année 1891, Brahms se sent épuisé. Il a écrit quatre immenses symphonies, Il veut arrêter d'écrire, de composer. A 64 ans, il se sent vieux. Il pense qu'il n'a plus rien à dire. Il s'est, d'une certaine façon, retiré du monde. Et puis le pessimisme de la fin du siècle le ronge.
Jusqu'à cette rencontre : pendant un concert, Brahms entend un clarinettiste qui le bouleverse. Il est ébloui par son jeu et par l'instrument, le timbre chaud et humain de la clarinette, les émotions que le son de cet instrument crée chez le public. Le musicien d'exception s'appelle Richard Mühlfeld, il est devenu un virtuose de la clarinette tout seul, à force de travail. Ce concert auquel assiste Brahms ranime chez lui la flamme de l'inspiration. Brahms décide alors de rompre son vœu de silence, et il écrit cette pièce pour cordes et clarinette, de manière fulgurante.
En cet été 1891, Brahms passe ses vacances dans la station thermale la plus ancienne et la plus célèbre d'Autriche.
C'est une succursale de Vienne. Il y retrouve toute la Cour. Mais avec les années, Brahms est devenu de plus en plus asocial. On le décrit rude et grossier. La musique, elle, ne montre rien de tout cela. Ce Quintette avec clarinette est parmi les plus belles pages écrite par Brahms. Il n'y a pas de recherche d'éclats ou d'effets. C'est l'œuvre d'une douce et paisible vieillesse.
Brahms s'efface et la voix de la clarinette s'enroule mélancoliquement comme une berceuse contemplative. 100 ans après que Mozart a écrit son quintette avec clarinette, Brahms se risque donc à l'exercice à son tour.
Et comment réagissent le public et les critiques quand l'œuvre a été jouée pour la première fois ?
Ils sont enthousiastes. Il faut même refuser du monde. Brahms mourra quatre ans plus tard, au mois de mars 1897. Il prend alors le temps d'écrire une lettre à sa belle-mère pour lui dire de ne pas s'inquiéter pour son état de santé. Mais le cancer l'avait atteint. Les drapeaux furent mis en berne sur tous les bateaux du port de Hambourg, la ville où il est né. Une foule immense assista à ses obsèques à Vienne.