Lutter contre la pauvreté, qui risque d’imploser avec la crise du coronavirus, est un choix politique mais également une question de modèle économique. Dans le treizième épisode du podcast "Les Éclaireurs", Matthieu Belliard prend le temps d’interroger l'économiste Elise Huillery. Elle décortique le concept de revenu universel et explique que même avec très peu de croissance, il est possible de lutter contre la pauvreté.
A cause de la crise liée au coronavirus, la pauvreté risque d'exploser. Les associations commencent à le ressentir. Et la Banque Mondiale elle-même estime que 150 millions de personnes sur la planète vont basculer sous le seuil de l’extrême pauvreté. Le sujet est politique mais il est également économique. A partir de quel seuil est-on considéré comme pauvre ? Peut-on lutter contre la pauvreté même quand la croissance est au plus bas ? Et peut-on sortir de la crise sans s'attaquer à ce problème ?
Dans le treizième épisode du podcast "Les Éclaireurs", Matthieu Belliard prend une nouvelle fois le temps d’écouter le monde changer. Avec son invitée Elise Huillery, économiste, professeure à l’université Paris-Dauphine, membre du Conseil d’Analyse économique et chercheuse auprès du laboratoire co-fondé par la Prix Nobel Esther Duflo, le présentateur de la matinale d'Europe 1 décortique en détail cette idée forte : les gouvernements ont un réel intérêt économique à lutter contre la pauvreté. Y compris en temps de crise.
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Trois idées à retenir pour prendre le temps d’écouter le monde changer
On peut réduire la pauvreté avec très peu de croissance. (à écouter à partir de 14'29). "La croissance se situe entre 1 et 2 % de manière un peu structurelle. Ça veut dire que le gâteau qu'on doit se partager existe, il est là", souligne Elise Huillery. "C'est absolument suffisant pour faire en sorte que dans la distribution de ce gâteau, on en redonne une part qui paraît décente à tout un chacun. Il n'y a pas besoin d'avoir 5 ou 10% de croissance pour commencer à se préoccuper de la plus petite part du gâteau".
Le gouvernement a beaucoup appris de la crise de 2008-2009. (à écouter à partir de 7'57) En mars dernier, Emmanuel Macron n'a pas hésité à mettre en place des mesures massives de chômage partiel. "On a beaucoup appris. En 2008-2009, on n'a pas voulu faire le chômage partiel et on s'est rendu compte dans les années qui ont suivi à quel point on avait fait une erreur", rappelle Elise Huillery. "Quand on ne vient pas en aide aux entreprises, aux salariés, on met des années et des années à s'en remettre parce que les gens perdent leur emploi, les entreprises ferment. C'est extrêmement long de rallumer tous les moteurs. Donc en 2009, on a été un des pays qui a mis le plus de temps à redémarrer. On a une reprise économique qui s'est faite vraiment à partir de 2014-2015 et on s'est rendu compte que la politique d'austérité ne sert pas dans ces cas-là"
Les aides sociales ne confortent pas les gens dans la pauvreté. (à écouter à partir de 16'47). "De tout temps, il y a eu ces théories libérales qui disent que quand on aide quelqu'un, on le rend fainéant. Ça a l'air d'être frappé sur le coin du bon sens", rappelle l'économiste. "En fait, on omet complètement que les individus ne cherchent pas à maximiser en permanence leur bien-être monétaire. Ces théoriciens ont oublié que dans le fait d'avoir un emploi se jouent beaucoup plus de choses que juste gagner de l'argent. Il se joue le fait d'avoir une position sociale, d'avoir un intérêt à ce que l'on fait, d'avoir une participation dans la société."