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Chaque jour, François Clemenceau traite d’un sujet international.

François Clemenceau, une réunion de la Ligue arabe est sensée aujourd’hui évoquer la crise à Gaza, mais il n’est pas sûr qu’on assiste à une levée de boucliers unanime contre Israël.

Et c’est peut-être presque aussi important que ce bain de sang de lundi à la frontière entre Gaza et Israël. Depuis des décennies, la diplomatie arabe avait au moins ce mérite de faire bloc dès lors qu’il s’agisse de la Palestine. Pas forcément pour tenter une nouvelle agression militaire contre Israël, comme en 1948, 1967 ou 1973 -la chose est en effet devenue plus compliquée depuis que l’Egypte et la Jordanie ont signé la paix avec l’Etat hébreu- mais pour combler le rapport de forces par l’usage répété du carnet de chèques. L’Arabie saoudite et l’Union européenne sont en effet les deux principaux trésoriers de l’Autorité palestinienne et tout le monde s’accorde à dire que sans cette aide, la Palestine serait en faillite. De son côté, le Qatar s’est montré très généreux vis-à-vis du Hamas qui contrôle Gaza depuis douze ans. Deux autres pays, qui ne sont pas membres de la Ligue arabe, jouent un rôle crucial : la Turquie et l’Iran, très clairement engagés en faveur du Hamas et d’autres organisations de lutte armée contre Israël, comme le Jihad islamique. Aujourd’hui, les choses sont encore pires. Car l’Arabie saoudite, même si en augmentant récemment son aide financière à l’Autorité palestinienne, a clairement indiqué que son alliance avec Israël contre l’Iran était plus importante que son soutien à la cause palestinienne. Idem pour les Emirats arabes unis qui s’apprêtent à recevoir bientôt leur premier dignitaire israélien en visite officielle, le ministre de la communication Ayoub Kara, le seul membre non-juif du gouvernement d’Israël mais qui défend la politique la plus extrême vis-à-vis des palestiniens. Il s’était même prononcé contre le retrait d’Israël de Gaza opéré sous Ariel Sharon.

La Palestine est-elle vraiment devenue une cause secondaire dans le monde arabe et musulman ?

Il faut distinguer les Etats et les peuples mais disons qu’il n’y a plus de tabous à ne soutenir la Palestine que modérément. Cela ne date pas d’hier et cela correspond aussi à une lassitude. Jusqu’à la mort d’Arafat, le soutien était de façade même si certains pays arabes avaient très mal supporté que les Palestiniens se servent de leur sol pour continuer la lutte contre Israël : c’est évidemment le cas du Liban mais aussi depuis 2011 de la Syrie. Et puis il y a eu le tournant du 11-Septembre qui a obligé nombre de pays du Golfe de revoir leur soutien, même voilé au terrorisme. Et enfin, cette mère des batailles depuis 2014 entre le monde sunnite et le monde chiite. Voilà le vrai conflit. C’est ce qui explique que même le petit émirat de Bahreïn applaudisse Israël lorsque Tsahal bombarde les forces pro-iraniennes en Syrie. L’un des rares pays qui n’a pas frontalement pris position dans cette nouvelle guerre par voisins interposés, c’est le Koweit qui a choisi de se battre contre l’Iran mais sans renoncer à défendre les Palestiniens face à Israël et jusqu’à l’ONU avec un projet de demande d’enquête qui a été torpillé par un véto des Etats-Unis.

Bref, la Ligue arabe n’est plus ce qu’elle était.

Il fut un temps où elle servait de lieu d’échanges extrêmement vif où s’opposaient frontalement les régimes nationalistes laïcs et les monarchies du Golfe avec l’Egypte comme casque bleu et Israël comme bouc-émissaire de tous leurs maux. Aujourd’hui, c’est tous contre l’Iran quitte à s’allier sans le dire trop fort avec Israël et avec comme victime expiatoire, les Palestiniens.