A Afrine, l'occident abandonne les Kurdes, leurs alliés, en laissant les Turcs prendre du pouvoir en Syrie, s'insurge Vincent Hervouet.
Le drapeau turc flotte sur Afrine, la ville syrienne dont les combattants Kkurdes ont été chassés. Il n’y a pas que le drapeau turc. Il y a celui de l’Armée syrienne libre. Cela ne manque pas de panache, l’armée libre, l’armée syrienne libre, cela nous parle à nous Français, on pense à Leclerc qui remonte d’Afrique vers le Rhin, pour bouter l’occupant. Sauf que l’armée syrienne libre, c’est le contraire.
L'addition de milices islamistes. L'armée syrienne libre n’est pas une armée, elle n’est libre de rien et l’indépendance de la Syrie n’est pas son combat. C’est l’addition de milices islamistes, des salafistes, des turkmènes, des wahhabites, et même des suppôts de Daech. Ils baignent dans les pétrodollars pour faire la peau aux Kurdes. Ils le feraient gratis. Depuis hier, ils pillent la ville fantôme.
Peshmergas chez eux. À tout prendre, ce sont les Kurdes qui ressembleraient davantage à la France libre. Les Peshmergas sont chez eux, ils s’accrochent à leur terre. Ils ne rêvent pas de convertir le monde, ils défendent leur mode de vie, l’égalité entre les hommes et les femmes, ils incarnent ces minorités en Orient qui résistent aux rouleaux compresseurs de l’histoire.
Crimes de guerre de la Turquie. Les Turcs font la guerre chez leur voisin, sans mandat de l’Onu, sans consulter l’Otan, sous le prétexte qu’un Kurdistan autonome à leur frontière serait une menace. Leur artillerie et leurs bombardiers ont aplati Afrine, l’une des seules villes intactes et provoqué un nettoyage ethnique. Tout cela ressemble à un crime de guerre. 250.000 civils ont fui ces derniers jours. Ils ont eu raison. Quand des femmes peshmergas ont été capturées, elles ont été violées avant de subir des horreurs qu’on n’oserait pas infliger à un animal en laboratoire. Ce sont d’autres crimes de guerre. En Syrie, les crimes de guerres restent impunis.
L'Occident regarde ailleurs. Sur le plan moral, Afrine, c’est affreux. Sur le plan politique, c’est pire. Il y a deux mois, la CIA voulait forger une armée de 30.000 Kurdes pour empêcher le retour des djihadistes dans le nord de la Syrie. La Turquie a tué le projet dans l’œuf. Et l’Occident a laissé faire. On arme les Kurdes quand ils combattent Daech. Quand ils se font écraser par Erdogan, on regarde ailleurs.
Les Kurdes ont demandé protection aux Américains plutôt qu’aux Russes. Les Kurdes ne sont jamais décevants quand il s’agit de se tromper. L’Amérique a abandonné ses supplétifs. Ce n’est pas la première fois au Moyen-Orient, comme en Afrique, en Asie, en Amérique latine. Avec les Kurdes, l’Occident joue toujours à Ponce-Pilate. Il y a 20 ans pile, Saddam Hussein gazait Halabja. C’était notre allié face à l’Iran. On s’est lavé les mains des 100.000 morts. Pourquoi pleurnicher aujourd’hui ? Après Afrine, les Turcs visent Kobané et Djezhiré, les deux autres enclaves. La partition de la Syrie vient de commencer.