Chaque jour, Vincent Hervouet traite d’un sujet international.
Fin de campagne au Liban. Dimanche, les premières élections législatives depuis neuf ans !
Les députés sont élus pour quatre ans, ils ont tenu plus du double, prolongés trois fois. Quand la guerre menace, il devient difficile de trouver une majorité pour voter des lois et tout à fait impossible d’organiser les élections... Le député ne fait plus rien, ne sert à rien mais devient indéboulonnable ! Un rêve de bureaucrate, le paradis SNCF. Les réfugiés débarquant de Syrie, et en sens inverse, les miliciens chiites et des djihadistes sunnites gagnant le front, toute cette cohue a bloqué les institutions.
Le Liban a plongé dans le calme précaire d’une base arrière.
L’an dernier, l’État a semblé rentrer dans l’ordre. Un Président a été élu. Grâce au Hezbollah. Michel Aoun trône à Baabda. Le Premier ministre Hariri pris en otage en Arabie parce que jugé trop faible avec le Hezbollah, a été délivré, il a repris sa démission, il gouverne. Et les députés ont enfin cédé au Hezbollah sur la réforme de la loi électorale, il y a plus qu’à l’appliquer, c’est dimanche.
On est passé du scrutin uninominal majoritaire au scrutin proportionnel, ce qui doit permettre aux petits partis et aux indépendants d’entrer au parlement.
On connait quelques avocats libanais assez pervers dans la politique française, (demandez à François Fillon). Il y a encore plus imaginatif, les constitutionnalistes !
Le système est diabolique : la proportionnelle et le scrutin de liste, avec des listes multi-confessionnelles composées en respectant les quotas de chaque communauté, mais avec un vote préférentiel que l’électeur doit accorder à quelqu’un qui appartient à sa mini-circonscription.
Officiellement, cela doit renouveler la classe politique, endiguer le clientélisme et le confessionnalisme qui ont installé de vraies dynasties familiales dans tous les partis : les Frangié, Gemayel, Jumblatt, Hariri, Berri. En prime, il y sept fois plus de femmes candidates que la dernière fois… et la diaspora a pu voter, vieille revendication des chrétiens…
Au Liban plus qu’ailleurs, l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Pourquoi ?
Dans les régions qu’il verrouille, le Hezbollah fera le plein, cent pour cent des sièges garantis. Dans les autres, Sunnites, Chrétiens et Druzes devront se serrer un peu et faire de la place au parti de Dieu. Autrement dit, ce qui est à moi est à moi et ce qui est à toi est négociable !
Avec l’aide du Très Haut, et on peut l’aider en bourrant les urnes, le Hezbollah disposera lundi de la majorité au Parlement.
Il avait déjà une armée privée qui intimide tous les autres, la seule milice qui n’a pas été désarmée, qui s’est aguerrie en Syrie, qui disposerait de cent mille missiles qu’elle n’hésitera pas à tirer sur Israël. Le Hezbollah a aussi noyauté l’appareil d’État, notamment l’armée régulière. Demain, le Hezbollah fera aussi les lois. Éventuellement, il changera cette constitution qui reste une curiosité démocratique et bariolée dans un monde arabe autoritaire et de plus en plus vert.
La conquête du Parti a commencé il y a trente-cinq ans, elle est sur le point d’aboutir.