Chaque jour, Vincent Hervouet traite d’un sujet international. Mercredi il s'intéresse au sort des Syriens de la ville de Deir Ezzor.
L’armée syrienne épaulée par les Russes a atteint mardi la ville de Deir Ezzor, dans l’Est de la Syrie. Elle a brisé le siège de la garnison installé par les djihadistes, c’est un tournant dans la guerre.
Cette guerre de Syrie est comme une route de montagne, pleine de virages, interminable. Impossible de voir sur quoi elle va déboucher, parfois on a le vertige, souvent la nausée… Le calvaire de Deir Ezzor n’a pas fait beaucoup fait pleurer Margot depuis trois ans et pour cause. D’abord, Deir Ezzor c’est un souvenir atroce : les camps de concentration du génocide arménien. Et puis, la ville n’est pas aussi photogénique qu’Alep, c’est la capitale de la province de l’Est, une ville des confins sur la route de l’Irak. Il y a du pétrole dans ce désert et des vergers au bord de l’Euphrate, mais c’est une ville ingrate, une ville agricole. Et c’est une ville de garnison. Or depuis le début de la guerre syrienne, il fallait un passeport russe ou beaucoup d’imagination pour compatir au sort des soldats syriens.
Étaient-ils à plaindre ?
Pas autant que les légionnaires à Cameron, mais il faut saluer le courage. À Deir Ezzor, quelques milliers de loyalistes ont résisté pendant près de trois ans aux assauts des djihadistes qui leur promettaient le massacre et ensuite, l’enfer. Ils contrôlaient la ville, mais deux grosses enclaves ont tenu : la base militaire au Sud-Est et l’aéroport à l’ouest, avec tout autour, des quartiers d’habitation et des civils pris au piège, sans eau, sans courant, assiégés par les enragés, abandonnés par l’armée. Certains sont morts de faim, d’autres par manque de soins… 93.000 civils retranchés dos au mur, c’est l’estimation de l’Onu qui a organisé des centaines de parachutages de vivres et leur a sauvé la vie.
Depuis mardi, ce sont les djihadistes qui se retrouvent dos au mur…
Ils ont miné les rues, verrouillées toutes les issues… Ils sont fébriles, sans autre perspective que mourir là, car l’armée ne fait pas de prisonniers, les supplétifs chiites encore moins. À Deir Ezzor, comme à Mossoul ou à Raqqa, le califat sombre, ceux qui ont fui à temps se regroupent dans le désert, à la frontière irakienne ou retournent au terrorisme. Depuis un an, on a dénombré 1.500 attaques dans les seize villes d’Irak et de Syrie libérés de l’Etat islamique. Les habitants de Deir Ezzor qui ont survécu ne sont pas prêts de cultiver leur jardins en paix.