C'est un des effets psychologiques de la crise que nous venons de vivre au cours des derniers mois. Un certain nombre de français, découragés par la montée du chômage, ont carrément décidé de quitter le monde du travail. Et ce n'est sans doute qu'un début car l'embellie estivale sur le marché de l'emploi devrait être de courte durée.
3.000 personnes ont baissé les bras, jeté l'éponge en 2008. Chômage en hausse, pouvoir d'achat en baisse, certains ont préféré quitter le marché du travail d'eux-mêmes. Il s'agit de femmes (et parfois d'hommes) qui ont fait les comptes et qui ont estimé que ça coûtait plus cher de faire garder les enfants et de prendre la voiture pour aller s'ennuyer au bureau. Il s'agit aussi de quinquagénaires qui ont cotisé suffisamment pour partir à la retraite et qui s'en vont alors que dans une période de croissance, ils auraient continué quelques années de plus. Il s'agit enfin d'étudiants qui, faute de débouchés, préfèrent prolonger leurs études ou partir à l'étranger pendant un an.
Et c'est inquiétant ?
C'est un peu cynique ce que je vais dire mais c'est plutôt une sélection naturelle qui donne un peu plus d'oxygène aux autres et au marché de l'emploi. 3.000 personnes face aux 2 millions de chômeurs, ce n'est pas grand chose mais ça donne une petite flexibilité. Et puis surtout, le phénomène va s'amplifier et devrait atteindre 20.000 personnes cette année : 1% du nombre de demandeurs d'emplois. C'est d'ailleurs un phénomène connu et observé à chaque crise et l'effet s'inverse dès que l'activité repart. En 2006 et 2007, par exemple, lorsque la France créait des emplois, on avait vu revenir entre 30 à 45.000 personnes par an. Des intermittents du travail, en somme !
Ça jette quand même un voile sur le deuxième anniversaire de la loi TEPA mise en place par Nicolas Sarkozy.
La loi TEPA, c'est la loi du bouclier fiscal et de la réforme des heures supplémentaires... Bref, c'est la mise en musique du "travailler plus pour gagner plus". Xavier Bertrand, aujourd'hui à la tête de l'UMP et, hier, aux manettes dans le gouvernement pour le lancement de cette loi. Xavier Bertrand salue le succès de TEPA et entonne le "happy birthday" - il est dans son rôle après tout et certains volets comme l'aide au secteur immobilier ou l'exonération des droits de succession ont permis de limiter les effets de la crise et ont été favorables aux classes moyennes - Mais la saison 2008/2009 a sérieusement ébranlé le "travailler plus" et le "gagner plus" ! En 6 mois, le volume d'heures supplémentaires a baisser de 10% et le mouvement ne cesse de s'accélérer.
Comment pourrait-il en être autrement ?
La métallurgie et l'automobile ont été plus lourdement touchées que le BTP et le tertiaire. Et c'est peut-être là qu'il y a une petite note d'espoir. On peut toujours critiquer les heures sup' en estimant que cela empêche de créer des postes, on sait très bien qu'il y a toujours une période de transition au cours de laquelle les entreprises ne peuvent pas encore embaucher mais doivent répondre à la hausse de la demande. Et c'est précisément dans cette période que nous sommes. Le fait que le BTP ou le tertiaire aient plus recours aux heures supplémentaires est un indicateur avancé car le bâtiment redémarre traditionnellement aux premiers frémissements de reprise pour livrer ses chantier en plein croissance. C'est toujours un secteur aidé par les plans de relance publics et une valeur refuge. Le tertiaire confirme, lui, que les deux tiers de l'activité du pays continuent à tourner. L'industrie lourde est toujours la dernière et la plus lente à redémarrer. L'économie n'est donc pas aussi grippée qu'il y parait. Croisons les doigts pour qu'elle ne soit pas affaiblie par la grippe A, justement. Signalons aussi que plus de 10% des salariés de l'automobile ont été au chômage partiel au 1er trimestre.