Comme tous les matins, Antoine Sollacaro avait pris sa Porsche pour aller acheter son journal dans une station-service, entre son domicile et son cabinet situé dans le centre-ville d'Ajaccio. Mais mardi, deux hommes attendaient l'avocat et l'ont abattu vers 9h15 avant même qu'il ait eu le temps de sortir de sa voiture. Dix douilles de gros calibre ont été retrouvées sur place.
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Un avocat impliqué et impulsif
Fort en gueule et très combatif, Antoine Sollacaro flirtait volontiers avec la provocation et quelques unes de ses plaidoiries ont marqué les esprits. Lors du procès d'Yvan Colonna pour l'assassinat du préfet Erignac, cet ancien bâtonnier du barreau d'Ajaccio n'avait ainsi par hésité à comparer la cour d'assises spéciale à une "junte birmane" avant de quitter le prétoire. Impulsif, il lui arrivait de dépasser les bornes : un autre de ses coups d'éclat lui vaudra en 2010 un avertissement de la cour d'appel de Bastia.
Depuis les années 1990, Antoine Sollacaro était l'un des avocats historiques du nationalisme. Il s'était plus particulièrement rapproché du clan d'Alain Orsoni, le Mouvement pour l'autodétermination (MPA). Récemment, l'avocat n'avait pas hésité à prendre fait et cause pour celui qui est aujourd'hui président du club de football d'Ajaccio, mais dont il se dit aussi qu'il serait l'un des "patrons" de la ville. Les prises de position d'Antoine Sollacaro pourraient bien, selon plusieurs observateurs des affaires corses, ne "pas être étrangères" à son assassinat.
La piste du banditisme corse privilégiée
Les enquêteurs de la direction régionale de la police judiciaire d'Ajaccio s'orientent ainsi vers la piste du banditisme. C'est donc la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille qui a été chargée de l'enquête, une unité qui s'occupe habituellement des affaires touchant au milieu corse. Par ailleurs, la piste d'un conflit d'ordre privé n'est pas exclue.
Considéré comme "l'avocat le plus emblématique d'Ajaccio" par l'actuel bâtonnier, Me Sollacaro était un habitué des dossiers de la Jirs. Sa clientèle comptait d'autres anciens du MPA. L'avocat avait également défendu plusieurs membres présumés ou proches du grand banditisme insulaire, comme Robert Feliciaggi, Michel Tomi, José Menconi ou encore Francis Mariani. Le berger corse Yvan Colonna avait aussi été l'un de ses clients jusqu'à l'an dernier.
Depuis quelques temps, Me Sollacaro, qui était aussi avocat d'affaires, s'était partiellement reconverti dans l'immobilier dans la région de Porto-Vecchio, en Corse-du-Sud. Marié à une professeur d'histoire, Antoine Sollacaro était le père d'un avocat du barreau de Nice et d'une fille qui devait passer mardi ses examens pour devenir avocate.