Sa "colère" lui est "montée à la tête" : le père de Kevin Trompat, jugé pour avoir voulu faire éliminer en prison les suspects du meurtre de son fils, a été condamné vendredi à 18 mois d'emprisonnement dont six avec sursis pour "menaces de mort". Le tribunal correctionnel de Niort l'a finalement relaxé du délit d'"instigations à l'assassinat non suivies d'effet" mais l'a déclaré coupable de "menaces de mort matérialisées par écrit, image ou tout autre objet en récidive".
La peine prononcée conforme aux réquisitions du ministère
La juridiction n'a pas ordonné son maintien en détention dans cette affaire mais Guy Trompat, 50 ans, n'a pas été libéré "dans la mesure où il exécute une peine de 4 mois d'emprisonnement suite à une condamnation de décembre 2022", a précisé le parquet dans un communiqué. La peine prononcée est conforme aux réquisitions du ministère public. Le prévenu encourait 10 ans d'emprisonnement. À la barre, c'est un homme accablé par une douleur "insurmontable" qui a tenté de justifier d'une voix posée la publication de messages en ligne appelant à "tuer" les mis en cause dans l'enquête sur la mort de son fils, 21 ans, et de la compagne de celui-ci, Leslie Hoorelbeke, 22 ans.
Dans l'enquête criminelle ouverte sur la mort des deux jeunes gens, dont les corps avaient été retrouvés début mars en Charente-Maritime plus de trois mois après leur disparition dans les Deux-Sèvres, cinq hommes ont été mis en examen, dont trois pour "assassinats", et placés en détention provisoire. "J'ai dit ça sous la colère", s'est défendu devant les juges Guy Trompat, chemise ouverte sur le torse, chaîne en or avec une croix. "Je ne veux pas qu'ils se fassent tuer en prison, je veux qu'ils passent à la barre, qu'ils soient jugés", a-t-il répété. "Il faut que je me fasse soigner. J'arrête Snapchat, les réseaux sociaux, putain", a-t-il ajouté.
Un message ciblé sur Snapchat
Le procès en comparution immédiate de cet ancien commerçant ambulant qui a été condamné 22 fois et a déjà passé 12 années en prison, avait été renvoyé le 4 mai, à sa demande. Parmi les messages incriminés, Guy Trompat dit d'un suspect "qu'on lui fasse sortir le sang par les oreilles", appelle à "lui casser la mâchoire", "le rendre paraplégique". "Que la colère rende fou, c'est une chose, qu'elle conduise à commettre des faits graves, c'en est une autre", a déclaré la représentante du ministère public, Nina Blanchon, dans ses réquisitions.
L'accusation a notamment ciblé un message sur le réseau social Snapchat : une somme de 100.000 euros aurait été promise à quiconque tuerait les suspects ou leurs proches. Guy Trompat a assuré que ce n'était pas lui, sans un sou en poche, qui l'avait écrit, mais la compagne d'un ami qui gérait son compte et qui "a cru bien faire".
Guy Trompat, une personnalité "jusqu'au-boutiste"
Le président du tribunal Éric Duraffour a décrit une personnalité "jusqu'au-boutiste" en situation "maniaco-dépressive", avec des troubles du sommeil depuis la mort de son fils unique. En détention provisoire, il a été placé dans une unité psychiatrique et est soigné pour dépression. "Je ne mangeais plus, j'étais tout le temps sur mon téléphone", a raconté Guy Trompat, qui a perdu jusqu'à 12 kilos. "J'allais sur la tombe de mon fils tous les jours", a-t-il ajouté.
"On lui a enlevé ce qu'il avait de plus précieux au monde", a rappelé son avocate Me Marie-Noëlle Moison. Après avoir demandé un huis clos "pour la sérénité des débats", refusé par la Cour, la défense avait réclamé une requalification des faits en "provocation à l'assassinat". "C'est un jugement qui paraît assez équilibré", a estimé Me Moison, qui affirme que son client "totalement dévasté il y a quelques semaines", est plus "apaisé", "capable d'évoluer et de surmonter sa peine. Ses regrets sont sincères".
L'avocate des parties civiles a assuré que ses clients, des proches de Tom Trouillet - l'un des mis en examen dans l'enquête sur la mort de Kevin et Leslie -, ne réclamaient "ni peine de prison, ni somme d'argent même symbolique", seulement de "ne plus vivre dans la peur".