Il était l’homme le plus recherché de la planète. Oussama ben Laden, tué au Pakistan lors d'une opération commando américaine, était le fils d'une riche famille saoudienne que rien ne prédestinait pourtant à devenir le chef d’un réseau terroriste. Depuis une quinzaine d’années, il était adulé et respecté par les uns, haï par les autres.
Un financier islamiste
D’origine yéménite et né, en 1957, dans une famille plutôt aisée en Arabie Saoudite, Oussama ben Laden était le douzième enfant, sur cinquante-cinq, d’un magnat du bâtiment et des travaux public, Mohammed ben Laden. Avec la famille royale d’Arabie Saoudite les Ben Laden entretenaient des liens étroits, si bien que le père du futur chef d’Al-Qaïda obtenait des contrats exclusifs avec le gouvernement saoudien.
Jeune, Oussama ben Laden épouse une cousine syrienne. Il a 17 ans. Tout au long de sa vie, il aurait eu au moins 23 enfants de cinq femmes ou plus.
Adolescent timide, étudiant moyen, le futur chef d'Al-Qaïda s'est forgé un destin de financier islamiste. Oussama ben Laden étudie le génie civil et le commerce à la prestigieuse université King Abdul Aziz de Djeddah. Ses amis de l'époque décrivent un jeune homme pieux, réservé, assidu dans l'étude des textes principaux du wahabisme, forme rigoriste de l'islam sunnite en vigueur dans son pays.
Son aide à l’Afghanistan
C’est en 1980 que son parcours bascule. Oussama ben Laden est approché par le chef des services secrets saoudiens. Il demande au jeune homme de recruter des militants islamistes pour prêter main forte aux moudjahidine afghans, alors que l’Afghanistan a été envahi quelques mois plus tôt par les troupes de l’URSS. Une opération soutenue par les Etats-Unis.
Le futur instigateur des attentats du 11-Septembre sillonne alors la péninsule arabique pour y lever des fonds pour son organisation et s'installe à Pechawar, base arrière au Pakistan de la guérilla antisoviétique. C’est là où il fait la rencontre de celui qui deviendra son mentor, le palestinien Abdullah Azzam, l'un des principaux organisateurs de la résistance antisoviétique. Les volontaires, arabes pour la plupart, affluent. Ben Laden les accueille, les encadre et élabore pour cela une base de données, la future d'Al-Qaïda. A cette époque, Oussama ben Laden va prendre une autorité considérable.
La naissance d’Al-Qaïda
A la mort de son ami Abdullah Azzam, neuf ans plus tard, Oussama ben Laden se retrouve à la tête de l’organisation qu’il a construite. Elle prend le nom d'Al-Qaïda (littéralement "la base"). Et le décès de son demi-frère Salem semble avoir contribué à sa radicalisation.
En 1991, Ben Laden condamne la présence en Arabie saoudite des troupes américaines chargées d'évincer l'armée irakienne du Koweït. Et, depuis cette époque, il restera persuadé que le monde musulman est victime d'un terrorisme international organisé par l'Amérique.
Une haine contre les Etats-Unis
Cette même année, Oussama ben Laden est accueilli par le Soudan islamiste qui l'expulsera cinq ans plus tard. La raison ? Les renseignements américains le soupçonnent de financer des camps d'entraînement terroristes.
Ben Laden refait ensuite surface en Afghanistan peu avant l'arrivée aux affaires des talibans, ses nouveaux alliés. Il décrète alors son djihad contre les Etats-Unis, qui ont financé la résistance afghane à laquelle il s'était joint, et tissera une toile mondiale de réseaux armés islamistes. Al-Qaïda s'engage dans des actions spectaculaires dès 1993, année d'un premier attentat contre le Word Trade Center qui fait six morts.
Il dira d’ailleurs que le "Mal" est incarné dans les "impies" américains arrivés dans son pays, gardien des lieux saints musulmans, pour la guerre du Golfe. Le "Bien" étant la guerre sainte qu'il affirmait leur livrer au nom d'un milliard de musulmans.
En 1995 et 1996, le Saoudien est tenu pour le principal responsable lors d’attentats à la bombe qui visent des soldats américains en Arabie saoudite. Et après le double attentat d'août 1998 contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie, qui a fait plus de 200 morts, Washington le désigne comme le cerveau de l'opération.
10 ans de traque
Dès lors commence une traque des Américains contre Ben Laden. Mais l'homme reste insaisissable. Pour autant, il n’arrête pas les frappes contre les Etats-Unis. En octobre 2000, un attentat est commis contre l'USS Cole, navire américain lance-missiles, dans le port d'Aden, au Yémen. Dix-sept de ses membres d'équipage périssent. L’ombre d’Al-Qaïda pèse sur cette attaque.
Oussama ben Laden renforce son mouvement au XXIe siècle, en territoire afghan, où sa richesse et son islamisme radical lui ont donné accès au premier cercle du régime taliban. Le chef d’Al-Qaïda organise des camps d'entraînement où des activistes sont préparés à des opérations terroristes à travers le monde. Liées par la haine de l'Occident, d'Israël et des dirigeants arabes modérés, ces recrues prêtes à mourir viennent d'Asie centrale et du Sud-Est, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Europe.
Après un entraînement intense, Oussama ben Laden s’attaque aux Etats-Unis le 11 septembre 2001. Trois avions détournés s'écrasent sur des sites symboliques aux Etats-Unis. Deux détruisent les tours du World Trade Center de New York, qui s'effondrent en direct sur les chaînes du monde entier, et un autre le Pentagone à Washington. Un quatrième appareil tombe en Pennsylvanie. C'est une opération terroriste sans précédent : les Américains enregistrent près de 3.000 morts et sont durablement traumatisés.
L'administration du président américain, George W. Bush, parle d'acte de guerre, désigne Ben Laden et décrète une "croisade" contre ce qu'il incarne en se jurant de l'"enfumer dans son terrier". L’ancien président jure de prendre l’auteur de l’attentat le plus meurtrier au monde, mort ou vif. Les recherches s'intensifient contre le chef d'Al-Qaïda.
Oussama ben Laden échappe fin 2001 à l'intervention des troupes américaines en Afghanistan. Il est localisé pour la dernière fois par des témoins en novembre 2001 à Kandahar dans le sud afghan. Depuis, avec son "adjoint" et numéro 2 d’Al-Qaïda, Ayman al-Zaouahri, ils ont diffusé à eux deux une soixantaine de messages émaillés de menaces sur les Etats-Unis et ses alliés européens.
Mort de Ben Laden
Les services de renseignements régionaux ou occidentaux ont longtemps estimé qu'il se cachait dans la zone bordant la frontière entre l'Afghanistan et le Pakistan. Mais les spécialistes confessaient en privé qu'ils n'avaient aucune piste sérieuse. Le président américain, Barack Obama, a annoncé lundi matin qu’Oussama ben Laden a été tué au Pakistan, dimanche, lors d'une opération commando américaine.