La chute de Laurent Gbagbo va-t-elle faire taire les armes ? C’est en tout cas le souhait exprimé lundi par Alassane Ouattara, président de Côte d'Ivoire, qui a appelé les ivoiriens à "s'abstenir de tout acte de représailles ou de violences", dans un premier discours prononcé après l'arrestation de son rival. "Je vous invite au calme et à la retenue", a-t-il dit.
Guillaume Soro, son Premier ministre, a, lui, appelé au ralliement. "Je m'adresse solennellement aux officiers, sous-officiers, militaires du rang de toutes les forces, je vous lance un dernier appel au ralliement. Il ne peut y avoir de chasse à l'homme, rejoignez donc les forces républicaines", a déclaré Guillaume Soro dans une allocution télévisée.
"C'est dommage qu'il y ait eu autant de tueries " :
Guillaume Soro a en outre demandé à la population "de garder le calme". "Peuple de Côte d'Ivoire, séchez vos larmes, le cauchemar est terminé. Vive la République de Côte d'Ivoire", a-t-il ajouté.
Apporter "la paix et la justice"
Un appel relayé par la communauté internationale. "Nous saluons la volonté d'Alassane Ouattara d'apporter la paix et la justice en Côte d'Ivoire", commente le président du Parlement européen, Jerzy Buzek dans un communiqué diffusé peu après l'annonce de l'arrestation du "boulanger". Le président élu "doit maintenant confirmer ses qualités d'homme d'Etat et prendre des mesures concrètes pour favoriser la réconciliation nationale, y compris parmi les forces armées".
De son côté, le secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki-moon, a demandé au président ivoirien d'éviter un nouveau "bain de sang" et des représailles à l'encontre des partisans du président sortant, a annoncé un porte-parole de l'ONU. Une demande qui intervient alors que l'ONU a donné un bilan chiffré de 536 morts depuis fin mars dans des affrontements dans l'Ouest de la Côte d'Ivoire, dont la majorité dans la ville de Duékoué.
Abidjan reste une ville fantôme
Hormis quelques scènes de liesse près de l'Hôtel du Golf, la capitale économique ivoirienne est une ville désertique lundi soir. Apeurés, les ivoiriens craignent désormais les règlements de compte, selon les informations de l'envoyé spécial d'Europe 1 en Côte d'Ivoire. Autour de la résidence de Gbagbo, certains témoins évoquent des dizaines voire des centaines de morts sur les trottoirs.
La moitié de la ville a envie de faire la fête, l’autre est repliée dans les quartiers Gbagbotistes. A Port Boué, les mercenaires qui ont semé la terreur sont repliés avec les armes distribuées très massivement dans la semaine. Même les jeunes endoctrinés par dix ans de "gbagbotisme" ne savent pas s'en servir, leur réaction reste inconnue. Vont-ils se soumettre ?
A l'inverse, quelle va être la réaction des Pro-Ouattara qui ont souffert des massacres tous les soirs ? Le désir de vengeance va-t-il pouvoir être contrôlé ? C’est le premier enjeu du pouvoir en place. L’aide des forces françaises et de l’ONU est donc plus que jamais utile pour sécuriser la ville.
L'étiquette française
La tâche d'Alassane Ouattara sera d'autant plus difficile en raison des circonstances de son arrivée au pouvoir. L'aide de la France, ancienne puissance coloniale, pourrait lui être reprochée par une partie de la population. Celui qui a acquis la reconnaissance internationale doit maintenant prouver qu'il est un véritable chef rassembleur.