Inde : Narendra Modi, un "fasciste soft" ?

Narendra Modi, le futur Premier ministre indien, le jour de sa victoire
Narendra Modi, le futur Premier ministre indien, le jour de sa victoire © Reuters
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PORTRAIT - Son parti est largement en tête des élections législatives. Le futur Premier ministre nationaliste hindou sème la crainte parmi les plus modérés et les musulmans.

L’HOMME. L’ampleur de sa victoire est historique. Narendra Modi, le leader du Bharatiya Janata Party (BJP), a ravi le pouvoir au parti politique de la famille Gandhi. Pour la première fois depuis trente ans, un mouvement politique obtient la majorité absolue au Parlement. S'il a promis de "réaliser les rêves des 1,2 milliards" d'Indiens, le futur Premier ministre de la plus grande démocratie du monde inquiète de nombreux observateurs, qui craignent une dérive fasciste.

Un nationaliste dans un pays aux mille visages. Narendra Modi lui-même se dit "nationaliste hindou", dans un pays qui rassemble pourtant des peuples à la culture et aux traditions différentes, du Nord au Sud, et autant de religions. Les hindous, majoritaires, vivent aux côtés des musulmans, des jaïns, des sikhs, des chrétiens, des bouddhistes au sein d’une démocratie laïque.

Un très bon bilan économique. Dans ce melting-pot indien, Narendra Modi incarne une aile radicale, également soutenue par les très nombreux déçus du parti du Congrès et de la corruption de ses membres. Son excellent bilan économique lors de ses mandats locaux a poussé les très nombreux entrepreneurs à voter pour le candidat qui s'est donné du mal pour effacer son image négative.

Les détracteurs de Modi n’hésitent pas à le comparer à Hitler ou Mussolini. En ce jour de résultats électoraux, le spectre de l’Etat d’urgence décrété par Indira Gandhi en 1975 ressurgit. L’Inde a en effet vécu sous l’ombre des militaires pendant deux ans de terreur instaurés par la fille de Nehru, en plein troubles interreligieux.

Impliqué dans des massacres de musulmans. La carrière de ce bourreau de travail ascétique est aussi impressionnant qu'inquiétant. Depuis treize ans, il est à la tête du Gujarat, un Etat indien frontalier du Pakistan. A peine arrivé à la tête du gouvernement régional, des émeutes contre la population musulmane. Bilan des violences interreligieuses de 2002 : de 1.000 à 2.000 morts. Si la justice indienne n’a jamais prouvé la responsabilité pénale de Narendra Modi, il aurait laissé faire, si ce n’est commandité ces pogroms, sur lesquels Le Monde des religionsest revenu en 2012.

Gujarat Inde 2002 massacre

© Reuters

Malgré ses nombreuses déclarations anti-musulmans lors de sa campagne électorale de 2002, le Pakistan voisin, par la voix de son Premier ministre Nawaz Sharif, a fécilité Narendra Modi pour sa "victoire impressionnante". Le "frère ennemi" de l’Inde semble donc bien peu s’inquiéter de l’arrivée au pouvoir du nationaliste hindou.

Des origines modestes. Les électeurs ont en effet largement plébiscité cet homme aux origines modestes. Avant d’être le leader du BJP, Narendra Modi, issu d’une basse caste, a tenu un stand de thé dans sa ville natale du Gujarat, dans l’ouest du pays, raconte Le Monde.

Excellent orateur, le futur Premier ministre a commencé sa carrière au sein d’une milice violente. Il est décrit comme un homme "peu enclin à accepter les divergences d’opinion, comme en témoignent les tentatives d’intimidation contre les écrivains et les artistes du Gujarat", selon The Telegraph, le journal de Calcutta, cité par Le Courrier international.

Les institutions seront-elles assez fortes ? Malgré tout, rares sont ceux à se dire réellement inquiets pour l’avenir de la démocratie indienne. Les espaces de débat comme les réseaux sociaux sont impossibles à censurer. Selon le Times of India, "l’Inde ira vers un fascisme soft plutôt que dur, car le pays est grand, divers, a une culture de débat, et le bras administratif du gouvernement est faible", écrit le journal anglophone.

"Ceux qui veulent un fascisme plus dur n’arriveront pas à l’imposer sur tout le territoire", continue le Times of India. Le parti du Congrès garde en effet le pouvoir sur l’écrasante majorité des gouvernements locaux. La démocratie indienne pourrait perdre quelques plumes,mais survivre à Narendra Modi.

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