Julian Assange a passé sa première nuit en prison. Le fondateur de WikiLeaks, sous le coup d'un mandat d'arrêt international lancé par la Suède pour des agressions sexuelles présumées, s'était présenté de lui-même dans un commissariat londonien mardi dans la matinée.
Sa demande de libération sous caution a été refusée par la justice. Un tribunal londonien a ordonné qu'il reste en détention jusqu'au 14 décembre, date de la prochaine audience. Plusieurs personnalités, dont le cinéaste Ken Loach, s'étaient déclarés prêtes à payer la caution.
L'un de ses avocats londoniens, Mark Stephens, a déclaré que son client "allait bien", et que l'audition par la police britannique avait été "très cordiale". "Ils ont vérifié son identité", a-t-il expliqué.
"Des charges sans fondement"
Agé de 39 ans, Julian Assange est accusé de "viol, d'agression sexuelle et de coercition" à l'encontre de deux femmes en Suède, des faits qui se seraient déroulés en août 2010. Il a mené depuis des mois une vie de fugitif et s'est efforcé de masquer ses traces. Il se trouvait depuis des semaines dans le sud de l'Angleterre, selon les médias locaux.
Le fondateur de WikiLeaks s'était défendu, quelques jours avant son arrestation, sur Twitter des faits qui lui sont reprochés. Julian Assange avait assuré que "les charges sont sans fondement et le fait qu'elles sortent en ce moment est profondément perturbant".
Le fondateur du site spécialisé dans la publication de documents classés a comparu à 15 heures devant la cour de justice de Westminster. Selon The Guardian, il est arrivé au tribunal à la mi-journée, accompagné de ses avocats Mark Stephens and Jennifer Robinson. Julian Assange devra répondre de plusieurs chefs d'inculpation dont "agression sexuelle" et "viol".
"La vérité l'emportera toujours"
Dans son édition de mercredi, le quotidien The Australian a publié un édito de Julian Assange, correspondant au lendemain de son arrestation. Dans ce texte, le fondateur de WikiLeaks reprend les propos de Rupert Murdoch, en 1958 : "Dans la course entre le secret et la vérité, c'est inévitable que la vérité l'emportera toujours''.
"C'est finalement arrivé"
Première réaction après cette arrestation d'un proche de Julian Assange, celle de son fils Daniel, sur Twitter. "Bien, c'est donc arrivé", écrit-il avant d'ajouter : "Il nous reste à tout faire pour que mon père soit traité de façon équitable et apolitique". En répondant à des utilisateurs du site de microblogging, Daniel Assange a dit espérer "que ce n'est pas seulement une étape intermédiaire vers son extradition vers les États-Unis".
WikiLeaks va continuer de publier
"L'arrestation de Julian Assange ne devrait pas avoir de conséquences sur la publication des documents diplomatiques par les médias partenaires de WikiLeaks", a estimé Olivier Tesquet, du site Owni.fr, sur Europe 1. "Julian Assange n’est pas le seul à l’opérationnel, je pense que les rédactions ont toujours un interlocuteur à qui parler", chez WikiLeaks. "Son arrestation ne changera pas le calendrier de publication" des câbles diplomatiques, a-t-il répété, soulignant qu'"il faudra attendre les auditions pour savoir si cela affaibli WikiLeaks sur le long terme".
C'est ce qu'a confirmé un journaliste travaillant pour le site. "Concernant tout ce qui se passe actuellement, tout est prévu, tout ça va continuer comme jamais. C'est tout ce que je peux vous dire", a déclaré James Ball. Un message posté peu après sur le compte Twitter de WikiLeaks affirme également que "les actions menées contre notre rédacteur en chef Julian Assange n'affecteront pas notre travail : nous publierons cette nuit d'autres télégrammes comme d'habitude".
Une extradition vers les Etats-Unis ?
Cette arrestation constitue le premier acte d'une bataille juridique qui s'annonce longue et compliquée, selon ses avocats. Ils se disent d'autant plus déterminés à combattre l'extradition de leur client vers la Suède qu'ils redoutent un engrenage judiciaire s'achevant devant les tribunaux américains. L'un des avocats de Julian Assange, Mark Stephens, a, à plusieurs reprises, indiqué qu'il ferait appel d'une éventuelle extradition vers les Etats-Unis.
Julian Assange est dans le collimateur de plusieurs grands pays, dont les Etats-Unis depuis la publication sur son site de câbles diplomatiques américains. Les Américains menacent de poursuites le fondateur de WikiLeaks, en représailles à la diffusion de télégrammes diplomatiques américains hautement embarrassants.
La procédure d'extradition de Julian Assange pourrait prendre plusieurs semaines, voire des mois. En cas d'acceptation de la procédure d'extradition, le prévenu est déféré sous dix jours devant un juge. Il dispose d'un délai de sept jours pour faire appel. S'il y renonce, il est susceptible d'être extradé dans les dix jours suivant l'expiration du délai d'appel. Mais en cas de contestation, "la procédure peut durer des mois, avec des recours devant la cour d'appel et la cour suprême", a précisé l'agence britannique pour le crime organisé (SOCA).