En quelques mois, l’Etat islamique est devenu l’ennemi public n°1 des Occidentaux en semant la terreur en Syrie et en Irak. Le groupe djihadiste a récemment appelé ses soutiens à frapper par tous les moyens les pays qui s’acharnent à réduire ses positions irakiennes et syriennes en poussière. Pourtant, un autre mouvement terroriste menacerait sérieusement les Etats-Unis : Khorasan.
Le 23 septembre, les Etats-Unis ont d’ailleurs profité des frappes aériennes contre l’Etat islamique en Syrie pour s’en prendre aux positions de Khorasan. Il y a moins d’un mois, on ignorait pourtant jusqu’à l’existence de ce groupe djihadiste, devenu une cible privilégiée de Washington. Les services de renseignement n’ont divulgué son existence que quelques jours avant le début des frappes. Que se cache-t-il alors derrière Khorasan ?
Etat islamique, Al Nosra, Khorasan. Revenons aux bases. Actuellement, l’Etat islamique fait la une des journaux du monde entier. Mais l’organisation dirigée par Abou Bakr Al-Baghdadi n’est pas seule en place dans le monde du djihad en Syrie. En parallèle de l’Etat islamique, le Front Al-Nosra tente de garder ses positions en Syrie. Ce deuxième groupe, qui a fait allégeance à Al-Qaïda, combat le régime de Bachar Al-Assad, mais aussi l’Etat islamique. Alors, où se situe Khorasan dans cette galaxie terroriste ?
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Al Qaïda, dénominateur commun. Selon des sources militaires, sécuritaires ou encore des services de renseignement américains citées par le New York Times, d’anciens cadres d’Al Qaïda travailleraient au sein de Khorasan. Al Qaïda servirait donc de dénominateur commun entre le Front Al-Nosra et cette cellule islamiste. Il est probable qu’Al Nosra fournisse "de la protection et du soutien logistique" à Khorasan, selon Afzal Ashraf, consultant en diplomatie et contre-terrorisme pour le Royal United Services Institute.
Un soutien qui faciliterait le travail de cette cellule. Ses occupations de prédilections : "l’organisation de complots terroristes utilisant des explosifs cachés", selon les termes du New York Times. Les membres d’Al Qaïda seraient venus profiter du chaos et du vide sécuritaire qui règne en Syrie pour travailler à l’élaboration de nouveaux types d’explosifs.
Quelle menace réelle ? "En termes de menace pour la sécurité intérieure, Khorasan pourrait poser autant de risques que l’Etat islamique", commente le directeur du renseignement américain, James R. Clapper Jr. A trop se concentrer sur l’EI, des experts de la sécurité cités dans le New York Times considèrent que la réalité de la menace terroriste a pu être déformée. Pourtant, "les menaces les plus immédiates viennent de groupes terroristes traditionnels, comme Khorasan ou le Front Al-Nosra", peut-on lire dans le quotidien américain.
En effet, les velléités terroristes de l’Etat islamique sur le sol de pays occidentaux sont récentes. "Jusqu’aux attaques contre ses positions en Irak, l’Etat islamique n’avait pas appelé à des attaques sur le sol occidental", rappelle Afzal Ashraf, et "de ce que je sais, le Front Al-Nosra n’a pas conduit une seule opération contre des cibles occidentales".
Les membres de Khorasan, en revanche, pourraient bien suivre leurs anciens plans de la "grande époque" d’Al-Qaïda : s’attaquer à des pays occidentaux. "A cet égard", estime Afzal Ashraf, "une bombe représente une menace plus importante que l’Etat islamique ou le Front Al-Nosra".
Une question de timing. Mais difficile de connaître l’état d’avancement des projets de Khorasan et la levée du mystère tombe à pic pour le gouvernement américain, qui mène en ce moment des frappes en Irak et en Syrie. De là à dire que Khorasan sert une opération de communication pour justifier les frappes ? "C’est une question difficile", concède Afzal Ashraf. Le spécialiste des réseaux terroristes ne balaye pas cette possibilité, "car les pays démocratiques ont besoin du soutien de leur population pour mener des actions à l’étranger". La révélation de l’existence de Khorasan, que l’on n’a découvert qu’il y a quelques semaines mais qui pourrait être actif depuis plusieurs mois, pourrait bien être un argument supplémentaire à cette nouvelle guerre qui s’engage.
Pour autant, en divulguant le nom de ce nouveau groupe, Washington pourrait simplement assurer ses arrières. Si ce groupe venait à mener ne serait-ce qu’une attaque sur le sol américain, "la population pourrait se retourner contre son gouvernement et lui reprocher de n’avoir pas agi contre [eux] et de n’avoir rien dit". Les services de renseignement "doivent envisager le scénario du pire".