L’INFO. La première puissance économique de l’Europe, l’Allemagne, renouvèle son Parlement dimanche. Selon les sondages, Angela Merkel est bien partie pour remporter un troisième mandat de chancelière à l'issue de ces élections législatives. Dans ce contexte quelle est la place future de l'Allemagne dans l'UE ? Quel avenir pour les relations franco-allemandes ? Europe 1 s’est associé avec CNN et le journal Les Echos pour organiser un débat jeudi à Paris en présence de personnalités politiques, du monde économique et des journalistes.
>>> Pour certains l’Allemagne, "le bon élève de l’Europe", est le modèle à suivre. Pour d’autres, le gouvernement de Merkel incarne surtout les politiques d’austérité dans la tempête de la crise européenne.Europe1.fr a demandé à plusieurs intervenants ce que la France pouvait importer de l’Allemagne. Quelles sont les bonnes idées allemandes ? Voici leurs réponses.
• Bruno Le Maire (@Bruno_LeMaire), ancien ministre UMP de l’Agriculture et des Affaires européennes et député de l'Eure : "améliorer le dialogue social".
LA BONNE IDEE qu’on peut reprendre c’est le dialogue avec les partenaires sociaux, les chefs d’entreprises et le monde politique. Si on veut vraiment que la France retrouve une capacité de production forte, qu’elle restaure la profitabilité de ses entreprises et donc qu’elle créé des emplois -ce qui est pour moi la priorité absolue-, il faut qu’on améliore ces discussions. Il faut sortir de l’idéologie et qu’on aille vers des idées concrètes. En Allemagne, ça marche. Il y a un dialogue qui est très serein.
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Quand l’Allemagne a obtenu de très bons résultats économiques l’année dernière, il y a eu une discussion entre les syndicats et les chefs d’entreprise sur la redistribution de ces profits et la possibilité d’augmenter les salaires. Vous avez des salariés de grandes entreprises, comme chez Wolkswagen, qui ont eu de très fortes augmentations. Ça s’est fait sans difficulté, sans crise. Au niveau où en est la France -avec un outil de production qui est à restaurer complètement-, je souhaite qu’on ait un dialogue de la même qualité.
• Hélène Kohl (@hkohl), correspondante d’Europe 1 en Allemagne : "arrêter le nucléaire"
LA BONNE IDEE, quitte à faire hurler, serait l’arrêt du nucléaire. C’est assez dingue de voir que deux pays aussi partenaires que la France et l’Allemagne aient deux politiques énergétiques aussi différentes. L’arrêt du nucléaire en Allemagne n’est pas une erreur stratégique. Je sais que c’est illusoire que la France puisse le faire parce que la part du nucléaire en Allemagne n’est pas la même que celle de l’Allemagne. On parle souvent de la réaction trop spontanée de Merkel à la catastrophe de Fukushima. Mais la décision d’arrêter le nucléaire date du début des années Schröder (chancelier de 1998 à 2005, ndlr).
L’Allemagne a eu le temps de se préparer et d’anticiper. Il y a un plan très clair. On dit souvent en France que c’est le charbon qui prend le relais. Le charbon est maintenu mais le plan de sortie du nucléaire substitue la masse produite par les centrales nucléaires et ce sont les énergies renouvelables qui prennent le relais. Les Allemands ont la capacité technique de faire face à ce défi et surtout les réserves financières. Certes, cela va coûter de l’argent, mais 80% des Allemands sont prêts à payer davantage pour financer cette sortie du nucléaire. A Berlin, il y a une libéralisation du marché de l’électricité qui fait qu’on a plein de fournisseurs d’électricité. Moi je suis passé à 100% de renouvelable qui sort de ma prise électrique. Ma facture a baissé parce qu’on fait jouer la concurrence. Pour les industries, c’est lourd mais il y a des possibilités. L’industrie de l’aluminium a passé un accord avec le gouvernement. En cas de pénurie d’électricité -par exemple l’hiver lorsqu’il y a des pics-, la production d’aluminium suspend sa production pendant deux heures et cela permet de remettre, dans le réseau, l’équivalent de deux centrales nucléaires. En échange, elle bénéficie d’un prix plus bas.
• Nina Dos Santos (@NdosSantos), présentatrice sur la chaîne CNN : "adapter le système éducatif au marché du travail".
LA BONNE IDEE serait de favoriser les passerelles entre le marché du travail et l’éducation. Des réformes ont été effectuées par les gouvernements successifs allemands, même avant que Merkel ne soit au pouvoir. On essaye là-bas de se focaliser autour de l’emploi des jeunes. L’Allemagne a le plus bas taux d’Europe (il est compris entre 6 % et 8 % selon les méthodes de calcul pour les 15-24 ans, ndlr). Il y a de vraies connexions entre le monde universitaire et les entreprises. L’Allemagne a toujours été en pointe dans ce domaine. Dans beaucoup de pays, dont la France, nous avons un système éducatif trop théorique et pas assez pratique qui conduit parfois des jeunes à choisir une branche où il n’y a pas de débouchés. La plupart du temps, quand j’interviewe des patrons de grandes entreprises, ils me disent : ‘nous avons du travail mais nous nous n’arrivons pas à pourvoir les offres’.