Les Vingt-Huit se mettent à la table des négociations jeudi pour un sommet extraordinaire après la mort de centaines de migrants, en quelques jours, en Méditerranée. Le but de cette réunion : mettre fin à l'hécatombe qui se déroule aux portes de l'Union européenne. Un plan d'action a été défini lors d'une réunion préparatoire lundi. Parmi les propositions évoquées, s'attaquer frontalement aux passeurs qui proposent aux candidats à l'immigration clandestine de traverser pour quelques centaines, voire quelques milliers d'euros.
Il faut "mener des efforts systématiques pour identifier, capturer et détruire les bateaux avant qu'ils ne soient utilisés par les trafiquants", indique un document préparatoire du Conseil européen. La chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini "est invitée à commencer immédiatement les préparatifs pour une possible opération de sécurité et de défense, en accord avec la loi internationale".
Une opération simple … D'un point de vue militaire, rien de bien compliqué pour une opération de la sorte. L'idée consisterait à déployer une flottille au large des côtes à la limite des eaux territoriales libyennes, d'où partent la majorité des migrants. Chaque frégate aurait une zone de surveillance désignée, correspondant à une zone de départ connue. Des avions de patrouille maritime pourraient de repérer les petits bateaux utilisés par les passeurs avant qu'ils ne chargent à bord les migrants. Ce travail de surveillance permettrait d'intercepter ou de détruire les bateaux avec les hélicoptères ou les commandos marine embarqués sur les bâtiments au large des côtes.
C'est en tout cas ce qui pourrait se faire, en théorie, si l'Union européenne décide de se doter des moyens militaires et juridiques. Elle le fait déjà au large de la Somalie avec l'opération Atalante de lutte contre la piraterie.
… dont l'efficacité est en doute. Mais dans la pratique, de nombreux obstacles et réticences viennent mettre des bâtons dans les roues à ce projet. Interrogé par Europe 1, le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans précisait jeudi que "capturer et détruire les embarcations de trafiquants nécessite un mandat" qui, si l'opération est étendue, pourrait être celui de l'ONU. Charge à l'Union européenne de convaincre les membres du Conseil de sécurité des Nations unies de voter pour cette opération.
Par ailleurs, on peut craindre que les passeurs cherchent à utiliser les migrants comme boucliers humains, même si les opérations militaires devraient évidemment se dérouler avant qu'ils n'embarquent. Ces dernières semaines, l'Organisation internationale pour les migrations a rapporté que les trafiquants d'êtres humains n'ont pas hésité à ouvrir le feu vers des bateaux de sauvetage pour récupérer leurs chères embarcations. Leur cruauté envers les personnes qu'ils transportent n'est plus à démontrer. On ne compte plus les histoires de migrants laissés des jours entiers sans eau, les corps sans vie jetés à l'eau, les bateaux abandonnés au milieu des flots, …
De plus, certains dirigeants européens doutent de la véritable efficacité d'une telle opération. Les passeurs vont très rapidement s'adapter comme cela a été le cas dans le passé. La route centrale qui passe des côtes tunisiennes et libyennes vers l'Italie n'est devenue que très récemment la plus empruntée pour les clandestins qui veulent rejoindre l'Europe. Auparavant, le passage vers l'Espagne par le Maroc était privilégié. Mais une surveillance renforcée de cette frontière a poussés les migrants à risquer leur vie dans un voyage sur mer bien plus long.
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Timmermans : "Il doit y avoir une solidarité...par Europe1fr>> LIRE AUSSI - Migrants en Méditerranée : qui sont les passeurs ?
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