Le ton se durcit entre les deux camps. Alassane Ouattara, reconnu vainqueur de l’élection par la communauté internationale, appelle "à la désobéissance" au pouvoir de Laurent Gbagbo, a-t-on appris mardi midi.
"Nous demandons au brave et fier Peuple Ivoirien, dans les campements, villages et villes de s'organiser, de se mobiliser et de manifester par tous les moyens jusqu'au départ de Monsieur Laurent Gbagbo du pouvoir", écrit son rival dans un communiqué. "Je vous exhorte dès cet instant à la désobéissance au gouvernement factice de Laurent Gbagbo jusqu'à son départ", ajoute-t-il.
La liste secrète des Etats-Unis
La tension monte également entre Laurent Gbagbo et la communauté internationale. Après l’interdiction, lundi, de visa pour l’Europe au clan Gbagbo, c'est au tour des Etats-Unis d'interdire de séjour les proches du président sortant sur leur sol. Une liste confidentielle d'une trentaine de personnalités proches de Gbagbo a été dressée, sans que l'on sache précisément qui y figure et notamment si Laurent Gbagbo lui-même est concerné.
Le mandat de l'Onuci prolongé
Le Conseil de sécurité a par ailleurs prolongé de six mois le mandat de la force de l'Onu en Côte d'Ivoire (Onuci). Une décision prise alors le président sortant réclamait le départ de l’Onuci, dont le mandat devait prendre fin le 31 décembre.
Dans une déclaration distincte, le Conseil avertit Laurent Gbagbo que toute personne responsable d'attaques contre des civils ou des casques bleus pourrait être traduite devant un tribunal international. Notant que les violences ont déjà fait plus de 50 morts depuis l'élection contestée, le Conseil engage l'Onuci à assurer sa mission de protection des civils.
Paris prêt à évacuer
Paris a redemandé mardi le départ rapide de Laurent Gbagbo. "Nous voulons que ceci se termine vite, que ceci se termine pacifiquement dans l'intérêt des Ivoiriens", a déclaré la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, lors des questions d'actualité à l'Assemblée nationale. Elle a souligné qu'aucune attaque ou menace n'avait été formulée pour l'instant envers des Français ou des Européens mais que la France se préparait à toute éventualité, y compris l'évacuation de ses ressortissants.
Les casques bleus ont déjà ouvert le feu
Alain Le Roy, sous-secrétaire général de l'Onu chargé des opérations de maintien de la paix, a déclaré que les casques bleus avaient déjà ouvert le feu en situation de légitime défense et qu'ils étaient prêts à recommencer pour défendre leur mandat, en particulier en ce qui concerne la protection des civils.
Le gouvernement de Gbagbo avait de nouveau réclamé lundi le départ de la force de l'Onu, présente dans le pays depuis 2004. "Si, contre notre volonté, on veut maintenir cette force-là sur notre territoire, nous ne coopérerons plus avec elle. Cela veut dire que les responsables de cette force n'auront pas d'interlocuteur officiel (...) Comment vont-ils travailler ?", a déclaré le ministre de l'Intérieur Emile Guiriéoulou.
De son côté, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a annoncé mardi la tenue vendredi à Abuja d'un sommet extraordinaire sur la Côte d'Ivoire, après avoir déjà suspendu le pays de ses rangs et demandé au président sortant Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir. Les pays de la Cédéao "souhaitent examiner les derniers développements en Côte d'Ivoire et voir comment nous pouvons y apporter une réponse collective", a déclaré Sunny Ugoh, porte-parole de l'organisation qui regroupe 15 pays.
" Laurent Gbagbo ne sera jamais un dictateur"
Le chef de la mission de l'Onu en Côte d'Ivoire, Y. J. Choi, a accusé le camp Gbagbo de mener une campagne médiatique incitant à la violence contre le personnel de l'Onu, faisant état "de jeunes hommes armés" intimidant certains employés à leur domicile. "Toutes ces actions n'empêcheront pas l'Onuci de mener à bien sa mission. Souvenons-nous de l'une des maximes de Winston Churchill : "si vous traversez l'enfer, ne vous arrêtez pas"", a-t-il ajouté.
Des actions qu’a démenti Bernard Oudin, conseiller spécial de Laurent Gbagbo, mardi matin sur Europe 1. "Il ne donne pas de consignes en ce sens. Monsieur Gbagbo est un homme de paix et ne sera jamais un dictateur", a-t-il précisé. Mais le président sortant ne semble pas prêt à se retirer. Selon Bernard Oudin, "le résultat donné le 28 novembre [qui donne Alassane Ouattara vainqueur, ndlr] n’est pas le résultat de l’élection". Pour le conseiller spécial de Laurent Gbagbo "la seule façon de sortir de cette crise, c’est de discuter et de négocier entre toutes les parties".