Ils sont des milliers, qu’on surnomme "les escadrons de la mort". De plus en plus de témoins et de vidéos attestent de la présence de "mercenaires africains" de Mouammar Kadhafi dans l’Est de la Libye. Envoyés par le chef d’Etat libyen dans cette région prise par les insurgés, ils auraient pour objectif de tuer un maximum d’opposants. Ce sont donc ces hommes qui auraient été utilisés par Kadhafi pour tirer sur sa population. Leur comportement entraîne une "chasse aux sorcières", qui nuit aux autres ressortissants subsahariens vivant dans le pays.
Venus du Tchad principalement, mais aussi du Mali et du Sénégal, ces hommes sont craints par la population. Leur nombre est estimé à 6.000 par la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), même si d’autre l’évaluent plutôt à 30.000.
Les "casques jaunes"
Depuis plusieurs jours, des vidéos postées sur Internet - souvent très choquantes - révèlent la présence d’escadrons portant des casques jaunes, et tirant à balles réelles sur la population. Des scènes de guerre qui se déroulent à Benghazi, fief de l’opposition libyenne.
Cette séquence, filmée par un amateur, s’est déroulée à Benghazi, il y a quelques jours :
Haïs par la population libyenne, ces mercenaires, qui sèment la terreur, sont l’objet de multiples rumeurs. L’une d’entre elles, relayée par plusieurs médias anglo-saxons, affirme que le colonel Kadhafi leur donnerait 1.000 euros pour chaque Libyen tué.
De nombreux témoins affirment également qu’ils provoquent des incendies, dans le but de faire régner une atmosphère de chaos dans le pays. Autre information relayée : certains auraient la nationalité française.
Du côté du pouvoir libyen, on nie l’importance de leur implication. Le fils de Mouammar Kadhafi, Seif al-Islam Kadhafi, a récemment qualifié de "mensonges" les informations selon lesquelles l'armée bombardait des civils ou faisait appel à des mercenaires.
Les soldats de la "Légion islamique"
Ces hommes de main africains à la botte de Kadhafi sont issus de la Légion islamique. Une armée inspirée de la Légion étrangère française, et symbolique du rêve de Mouammar Kadhafi : créer des Etats-Unis d’Afrique, et en devenir le leader.
Et cette armée, qui s’entraînait dans le sud de la Libye à sa création, dans les années 70, a participé à la défense des dictateurs, dont l’ex-président centrafricain Ange-Félix Patassé en 2002. Autre dictateur ayant obtenu l’aide de Kadhafi et de ses hommes : Idriss Deby, le président tchadien, confronté à une forte rébellion en 2008.
Aujourd’hui, ces mercenaires sont les dernières cartouches de Mouammar Kadhafi pour se maintenir au pouvoir. L’autre "bouée" à laquelle Kadhafi peut se raccrocher est la reconnaissance du président Deby, qui reste un de ses plus fidèles soutiens, et donc un grand pourvoyeur de mercenaires.
La haine des Libyens
Devenus ennemis publics numéro 1 en Libye, ces mercenaires sont l’objet d’une forte rancœur, provoquant des lynchages. Une haine qui se retourne contre les nombreux noirs africains qui vivent et travaillent en Libye - un tiers de la population libyenne était étrangère avant les récents évènements -.
Plusieurs reportages ont récemment montré que ces "petites mains", généralement pauvres, sont terrorisés, et ne se montrent plus en public, de peur des actes de vengeance. D’autres sources, dont la FIDH, révèle que des Libyens empêcheraient les ressortissants subsahariens de quitter leur pays, les prenant pour des mercenaires.
Pas tous inquiétés par l’ONU
"Nous voulons que Kadhafi parte et qu'il rappelle ses mercenaires", a exigé Hillary Clinton lundi, lorsqu’elle se rendait à Genève pour une réunion du Conseil des droits de l'homme de l'ONU consacrée à la Libye.
Ce bataillon ne devrait pourtant pas être entièrement passible de crime de guerre. Les Etats-Unis ont en effet ajouté une clause, le week-end dernier, à la dernière résolution de l’ONU contre Kadhafi. Le pays a insisté pour qu’aucun ressortissant d’un pays non membre de la Cour pénale internationale ne puisse être poursuivi pour ses crimes en Libye.
Parmi ces pays non membres, on compte notamment l’Algérie, l’Ethiopie ou la Tunisie, mais aussi…les Etats-Unis. Une bonne façon de protéger la population américaine donc. En revanche, le Tchad fait partie des 114 pays membres.