• L'organisation de l'Etat islamique est-elle vraiment le commanditaire de l'attentat ?
En précisant que c'est bien le musée du Bardo qui était visé, et pas le Parlement comme on aurait pu le croire initialement vu qu'un projet de loi anti-terroriste était étudié en ce moment, la façon de revendiquer cet attentat paraît assez crédible dans la formulation.
Dans le communiqué, on trouve l'idée que les terroristes combattent des touristes, des "Croisés", donc des Occidentaux. De plus, la façon de nommer les deux terroristes en mettant à côté de leur nom le qualificatif de tunisien, s'apparente à la façon de nommer les gens utilisé par l'organisation Etat islamique : Abu Bakr al-Baghdadi, son "calife", se nomme ainsi car "al-Baghdadi signifie le Bagdadien.
Maintenant, la question, c'est de savoir si de simples illuminés avec une kalachnikov peuvent se revendiquer de l'Etat islamique. La Tunisie, est quand même très loin de la base territoriale de l'EI, même si des groupes situés en Libye, pays frontalier, revendiquent leur appartenance à ce groupe. L'intérêt pour des terroristes, c'est que le "label" Etat islamique permet d'avoir une marque de fabrique bien identifiée et donc 'alimenter toute une communication autour de l'attaque.
• Pourquoi avoir frappé la Tunisie ?
On ne peut pas s'empêcher de penser que la Tunisie, qui était en train de relever la tête après une transition politique, démocratique et économique réussie - la Tunisie est un des seuls pays de la région où tout le spectre politique est représenté d'Ennahdha (parti islamique) aux libéraux - donnaient envie aux touristes de revenir en Tunisie. C'est donc un message politique délivré par les terroristes, ils savent exactement ce qu'ils font. Il y a des meurtres tous les jours d'Irakiens et de Syriens dont on ne parle pas dans nos médias. L'Etat islamique a donc compris qu'il fallait tuer nos ressortissants pour nous toucher.
• Comment prévenir ces attaques ?
C'est toute la difficulté. Les auteurs de ces attaques sont des personnes aux profils inattendus. Au-delà de cette imprévisibilité, la Tunisie a un problème de renseignement et de sécurité. Or, les services de sécurité ont été déstabilisés pendant quatre ans après le Printemps arabe et la chute de Ben Ali. Il n'y avait pas d'Etat fort depuis. Cela demande aujourd'hui d'affronter et de prendre en compte ce nouveau type de menaces, il faut restructurer les services.
• Pourquoi est-il compliqué de tout contrôler pour les autorités de Tunis ?
Le vrai drame, c'est la proximité avec la Libye. Le chaos qui règne dans le pays (deux Parlements concurrents ont proclamé leur légitimité, des tribus rivales tiennent chacune une part du territoire et un groupe terroriste tient la ville de Derna) a des conséquences en Tunisie. Autre problème, la frontière est poreuse. Un chiffre illustre ce fait : plus d'un million de Libyens vivent ou travaillent en Tunisie, ce qui témoigne du brassage constant des populations dans la région. Le fait que les deux auteurs de l'attaque du Bardo se soient entraînés en Libye confirme que, pour la Tunisie, le danger vient bien de l'est.
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