Ce sont eux qui fabriquent les chaussures que vous portez peut-être aux pieds. Plus de 30.000 ouvriers d’une usine du sud de la Chine sont en grève depuis plusieurs jours et n'ont pas l'intention de s'arrêter. Le site appartient au groupe Yue Yuen, qui possède plusieurs usines et compte parmi ses clients Nike, Adidas ou encore Timberland. Cette dernière marque précise qu'aucun de ses produits ne sont fabriqués dans l'usine concernée par la grève. Autour du site en question, plusieurs centaines de policiers antiémeutes ont été envoyés, selon Kevin Slaten, coordinateur de l’ONG China Labor Watch, basée à New York. Cette grève, qui n’est pas inédite, surprend toutefois par son ampleur.
Ils réclament leur dû. Les grévistes réclament notamment le paiement d’arriérés. Bien des entreprises en Chine ont en effet une fâcheuse tendance à oublier de cotiser pour leurs employés. Dans l’usine de Yue Yuen, une employée interrogée par le South China Morning Post s’est ainsi rendue compte que malgré ses 18 ans de travail au sein de l’entreprise, elle ne pouvait pas percevoir la totalité de sa retraite. Certains employés de Yue Yuen réclament aussi le paiement des repas et l’hébergement gratuits inscrits dans leurs contrats de travail, précise Kevin Slaten à Europe1.fr.
Des arrestations en série et des grévistes frappés. Mais faire grève en Chine, c'est s'exposer à un sérieux retour de bâton. Des grévistes ont envoyé à l'ONG China Labor Watch une vidéo de la répression d’une manifestation par la police, alors que les manifestants se dirigeaient vers la mairie de la ville. "En pleine rue, la police a chargé une manifestation pacifique", dénonce le responsable de l'organisation.
Des images transmises par les grévistes à l'ONG :
Plusieurs personnes auraient été arrêtées et d’autres auraient été frappées par les forces de l’ordre. Après avoir défilé lundi et mardi, les employés de l’usine ont refusé de reprendre le travail mercredi. Et semblent déterminés à poursuivre le mouvement tant qu’ils n’auront pas pu négocier avec la direction, explique Kevin Slaten.
Une grève en Chine, ça vous semblait impossible ? L’absence d’organisations syndicales indépendantes n’empêche pas le déclenchement de mouvements de grèves. Dans le cas de l’usine Yue Yuen, tout a commencé le 5 avril, après le lancement d’un groupe sur le site de messagerie instantanée QQ, selon le China Labour Bulletin, une autre association, basée à Hong Kong. Des ouvriers ont alors bloqué un pont et le mouvement a pris de l’ampleur petit à petit.
"Cela n’a cessé de prendre de l’ampleur depuis, jusqu’à toucher des dizaines de milliers de travailleurs", détaille Kevin Slaten. Seule différence avec nos grèves "à nous", le mouvement n’a pas vraiment de porte-parole identifié, car les employés chinois savent que les leaders des grèves sont souvent arrêtés ou harcelés.
Et si ce mouvement créait un "précédent" ? Dans la province du Guangdong, surnommée "l’usine du monde", les conflits sociaux ne sont pas rares. Surtout quand les employés se rendent compte que leurs droits sont bafoués. En Chine, "les travailleurs sont de plus en plus enclins à utiliser l’action collective pour changer les choses et faire respecter leurs droits", note Kevin Slaten, soulignant que cette évolution est liée aux travailleurs les plus jeunes. Eux qui communiquent beaucoup via les réseaux sociaux ne se veulent plus se laisser marcher sur les pieds : "contrairement à leurs parents, ils ne sont pas habitués à travailler dans les champs et ont des exigences plus importantes qu’eux", analyse le coordinateur de China Labor Watch. Quant à la grève de Yue Yuen, il s’agit de "l’une des plus importantes" en Chine dans l’histoire récente. Pour Kevin Slaten, le mouvement est "prometteur" et "une fois que l’entreprise sera sortie de ses bureaux pour commencer à négocier, cela créera un précédent pour d’autres actions similaires".
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