À n'en pas douter, le 5 mai 2021 restera comme une date-clé dans l'histoire de Facebook. Mercredi, à 15h, le Conseil de surveillance de Facebook, organe créé en 2020, va rendre son verdict à propos de la suspension du compte de Donald Trump. Le réseau social avait banni l’ancien président américain en janvier, estimant qu’il avait posté des messages ayant incité ses partisans à attaquer le Capitole. Pour cette raison, Donald Trump a été banni à vie de Twitter mais "seulement" temporairement de Facebook. Son éventuel retour a été étudié pendant plusieurs semaines par le Conseil de surveillance de Facebook, un nouvel organe entièrement dédié à la modération.
Le Conseil de surveillance a été créé en 2020 pour répondre aux critiques récurrentes sur la politique de modération de Facebook. Sorte de Cour Suprême du réseau social, il a le pouvoir de trancher les dossiers les plus sensibles en matière de retrait de contenus sur la plateforme. Financé par Facebook, par le biais d'une fondation, à hauteur de 130 millions d'euros pour cinq ans, le Conseil se veut malgré tout indépendant dans son fonctionnement. Dans les faits, il n'existe pas de lien entre Facebook et cet organe dont les principes et les missions sont définis dans une charte.
Quelle est la mission du Conseil de surveillance ?
Cet organe peut-être saisi par tout utilisateur de Facebook qui s'estimerait lésé par une décision du réseau social à son encontre. "La procédure d’appel du Conseil de surveillance est un moyen de contester les décisions sur Facebook ou Instagram. Si vous avez déjà demandé à Facebook ou à Instagram d’examiner l’une de ses décisions relatives au contenu et que vous n’êtes pas d’accord avec la décision finale, vous pouvez faire appel auprès du Conseil", peut-on lire sur le site du Conseil de surveillance (disponible en français).
Mais tous les problèmes de modération ne relèvent pas de cette "Cour Suprême", loin de là. "Les membres du Conseil évalueront les cas soumis, et le conseil sélectionnera les cas éligibles à partir de ces demandes et déterminera lesquels doivent faire l’objet d’un examen approfondi", est-il expliqué sur le site. Le Conseil de surveillance sélectionne en réalité des cas éligibles "complexes, importants et pertinents à l’échelle mondiale et qui pourront contribuer à de futures règles."
Qui sont les membres du Conseil de surveillance ?
L'indépendance vaut également pour les membres du Conseil qui ne sont pas nommés par Facebook. N'importe qui peut proposer un candidat par le biais d'un portail en ligne ouvert par un cabinet d'avocat de Chicago. En mai 2020, 20 membres, dont quatre co-présidents, ont été choisis. Ce sont des personnalités issues de la société civile, de 16 nationalités différentes et sans lien avec Facebook. La plus connue est Helle Thorning-Schmidt, ancienne Première ministre du Danemark. À ses côtés, on trouve des avocats, des professeurs de droit constitutionnel, des journalistes, des spécialistes d’Internet ou encore Tawakkol Karman, une militante yéménite, Prix Nobel de la Paix en 2011.
"Nous venons de cultures et d’horizons différents et avons des points de vue et des croyances différentes, et cette diversité est au cœur de nos efforts", souligne sur le site Thomas Hughes, le directeur du Conseil de surveillance. "Nous nous engageons à prendre des décisions indépendantes, fondées sur des principes et exécutoires concernant des éléments de contenu importants sur Facebook, en émettant des avis consultatifs sur les règles relatives au contenu de Facebook."
Comment travaille le Conseil de surveillance ?
Les 20 membres du Conseil ne travaillent pas forcément en plénière. "Une fois un cas sélectionné, un groupe de membres y sera affecté", peut-on lire sur le site. Pour examiner un cas, l'organe utilise "les informations partagées par la personne ayant fait appel et les informations contextuelles de Facebook, conformément aux restrictions juridiques et de confidentialité applicables". Depuis son entrée en fonction en janvier, le Conseil a rendu huit jugements sur des cas de publications supprimées par Facebook : six fois, ses membres ont déjugé le réseau social et deux fois, ils ont confirmé la décision.
Le cas Trump est le premier gros dossier sur la table de l'organe de modération et, à ce titre, il sera particulièrement scruté. D'abord car c'est la première fois que le Conseil juge un compte et non une publication. Et puis, "cette décision sera exécutoire, ce qui signifie que Facebook sera tenu de la mettre en œuvre, sauf si cela risque d’enfreindre la loi". Enfin, Donald Trump, qui continue de clamer, dans sa newsletter quotidienne envoyée par mail à ses partisans, que l'élection présidentielle a été truquée, devrait réagir à l'annonce avec force, qu'elle aille dans son sens ou non.