Album silencieux, lettre ouverte : au Royaume-Uni, plus d'un millier d'artistes dénoncent un projet favorisant l'IA

Un projet de réforme du droit d'auteur favorable aux sociétés d'intelligence artificielle suscite la défiance totale du milieu artistique britannique. Plus d'un millier d'artistes ont participé à un album silencieux ("Is This What You Want"), quand une trentaine d'autres artistes, dont Elton John et Sting, ont publié une lettre ouverte.
Plus d'un millier d'artistes britanniques, dont les chanteurs Damon Albarn, Annie Lennox et Kate Bush, ont participé à un album silencieux sorti mardi afin de protester contre un projet de réforme du droit d'auteur favorable aux sociétés d'intelligence artificielle (IA). En parallèle, une trentaine d'auteurs et artistes, dont les chanteurs Elton John, Sting et Dua Lipa et le prix Nobel de littérature Kazuo Ishiguro, publient mardi une lettre ouverte dans le journal The Times pour dénoncer une réforme "inutile et contreproductive".
Une exception au droit d'auteur dénoncée par ces artistes
Le projet du gouvernement prévoit d'appliquer une exception au droit d'auteur pour former les modèles d'IA. Les entreprises développant ces modèles n'auront plus besoin d'obtenir a priori l'autorisation des auteurs pour utiliser certains contenus. Cette proposition était mise en consultation jusqu'à ce mardi.
Baptisé Is This What You Want (Est-ce que c'est cela que vous voulez ?), l'album, auquel se sont également associés Jamiroquai, The Clash ou Billy Ocean, est composé d'enregistrements de l'ambiance sonore de lieux et de studios d'enregistrement vides et silencieux. La liste des titres des 12 morceaux forme la phrase : "le gouvernement britannique ne doit pas légaliser le vol au profit des sociétés d'intelligence artificielle".
"La proposition du gouvernement confierait gratuitement l'œuvre de toute une vie des musiciens du pays à des sociétés d'IA, permettant ainsi à ces entreprises d'exploiter le travail des musiciens pour les concurrencer", a dénoncé Ed Newton-Rex, musicien à l'origine de l'album.
Soutien de la presse britannique
La proposition du gouvernement suscite depuis des semaines de nombreuses critiques, dont fin janvier, celles de deux des plus grandes icônes de la musique britannique, Paul McCartney et Elton John. "Si vous présentez un projet de loi, assurez-vous de protéger les penseurs et les artistes, sinon vous ne les aurez pas de votre côté", avait ainsi affirmé l'ex-Beatle de 82 ans sur la BBC.
La presse britannique s'est associée mardi à ce mouvement de protestation. Dans une rare initiative commune, les principaux titres - The Daily Mail, The Sun, The Guardian, The Times, ou encore The Daily Telegraph - arboraient tous en Une un message sur fond bleu : "Make it Fair" (Faites que cela soit juste). Appelant à "protéger la plus importante ressource naturelle du Royaume-Uni", la News Media Association, à l'originie de cette initiative, estime que "sans rémunération, nos industries créatives ne survivront tout simplement pas".
En décembre, le Premier ministre Keir Starmer avait assuré devant une commission parlementaire que les industries créatives étaient "très importantes". "Je pense que nous devons être équilibré, mais je crois également que nous avons une incroyable opportunité", avec l'IA, avait-il affirmé.