Le président américain va annoncer sa décision d'ici mercredi. Promesse de campagne un temps mise de côté, Donald Trump pourrait finalement bien choisir Jérusalem comme futur siège de l'ambassade américaine en Israël, pour le moment toujours domiciliée à Tel Aviv. Mais cette décision, au-delà de sa charge symbolique, serait aussi explosive pour le processus de paix toujours en cours. Explications.
Vers un déménagement sans précédent ?
Si Donald Trump l'avait évoqué pendant sa campagne présidentielle, il avait finalement renoncé en juin dernier, pour un temps, au déménagement, en signant une clause dérogatoire permettant de conserver la chancellerie américaine à Tel-Aviv pour six mois supplémentaires. Une loi du 23 octobre 1995 votée par le Congrès impose en effet le déplacement de l'ambassade à Jérusalem, mais laisse au président en exercice la possibilité d'en retarder l'échéance tous les six mois. Ce qu'ont fait jusqu'à aujourd'hui tous les prédécesseurs de Trump.
La raison du revirement du président républicain ? Ce n'était "pas le bon moment". Donald Trump "a pris cette décision pour maximiser les chances de négocier avec succès un accord entre Israël et les Palestiniens", avait expliqué la Maison-Blanche.
Maintenant que six mois ont passé, le président américain devrait se prononcer à nouveau sur ce dossier brûlant cette semaine, plus précisément mercredi selon plusieurs médias américains. Et il devrait opter cette fois-ci pour un changement d'adresse. Le 28 novembre dernier, le vice-président Mike Pence a annoncé la couleur : "le président Donald Trump étudie sérieusement quand et comment déplacer l'ambassade américaine en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem". Mais cette nouvelle domiciliation impliquerait une conséquence de taille : Jérusalem serait pour la première fois reconnue par Washington comme capitale officielle d'Israël.
Jérusalem, capitale officielle... mais non reconnue
En 1949, une année après la proclamation de l'indépendance de l'Etat juif, Jérusalem-Ouest avait été reconnue comme capitale, l'est ayant été annexé par la Jordanie. En 1967, durant la guerre des Six-jours et après conquête de l'est par l'armée israélienne, la ville est unifiée. Ce n'est cependant qu'en 1980 qu'Israël officialise Jérusalem capitale "éternelle et indivisible". Les lieux de pouvoir, législatif, économique, judiciaire et administratif, y déménagent alors.
Mais la communauté internationale a toujours refusé de reconnaître ce fait. Les ambassades étrangères sont donc toutes installées dans le coeur économique de l'Etat hébreu, Tel-Aviv, à 67 km à l'ouest de la ville trois fois sainte. Seules la Russie et la République tchèque ont accepté de reconnaître Jérusalem-Ouest comme capitale, mais sans pour autant y installer leurs délégations.
Les Palestiniens revendiquent toujours l'est de la cité antique comme capitale de leur futur Etat. En 1988, dans sa proclamation d'un Etat palestinien, l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) choisit Jérusalem pour capitale. Pour le moment cependant, et en attendant que le processus de paix soit clos, l'Autorité palestinienne est pour le moment basée à Ramallah, en Cisjordanie.
L'Autorité palestinienne vent debout
Une décision de déménagement serait explosive, ont d'ores et déjà prévenu les Palestiniens. Selon le porte-parole de leur président Mahmoud Abbas, elle "détruirait le processus de paix" que Donald Trump s'est dit pourtant déterminé à relancer. Non seulement les Etats-Unis serait le premier pays au monde à reconnaître Jérusalem comme capitale, mais cette décision serait prise par un médiateur essentiel du processus de paix. Un rôle que Washington risque de perdre : les Etats-Unis risquent de se "disqualifier" en tant que médiateurs, a prévenu le secrétaire général de l'OLP Saëb Erekat.
Les islamistes du Hamas, de leur côté, ont menacé samedi dans un communiqué d'une "nouvelle Intifada". "Rien ne justifie cette décision. Cela ne servira pas la paix et la stabilité. Au contraire, cela nourrira le fanatisme et la violence", a mis en garde lundi le chef de la Ligue arabe Ahmed Abul Gheit dans des propos tenus devant des journalistes. La Jordanie, qui a signé la paix avec Israël en 1994, a aussi tapé du poing sur la table. Son ministre des Affaires étrangères Aymane Safadi a prévenu lors d'une conversation téléphonique avec son homologue américain, Rex Tillerson : une reconnaissance américaine de Jérusalem aurait des "conséquences graves", encouragera la violence et ne servira pas le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens.
Mahmoud Abbas a tenté dimanche de mobiliser la communauté internationale pour peser sur la décision américaine. Il s'est entretenu notamment avec ses homologues français Emmanuel Macron et turc Recep Tayyip Erdogan, "pour leur expliquer les dangers que comporterait toute décision de transférer l'ambassade" ou "reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël".