Le ministre allemand de l'Économie a appelé lundi les Européens à ne plus autoriser d'exportations d'armes vers l'Arabie saoudite tant qu'elle n'aura pas fait la lumière sur le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi.
Offrir un front européen face à Ryad. "Ce n'est que si tous les pays européens se mettent d'accord que cela impressionnera le gouvernement de Ryad", a affirmé Peter Altmaier sur la chaîne de télévision allemande ZDF, précisant que "les explications apportées" jusqu'ici par l'Arabie saoudite n'étaient pas "satisfaisantes". "Il n'y a aucun effet positif si nous restons les seuls à arrêter les exportations et si en même temps d'autres pays comblent le trou", a-t-il expliqué.
>> À LIRE AUSSI - L'Arabie saoudite confirme la mort de Khashoggi : "le déni était une position intenable"
Plus d'exportations d'armes vers l'Arabie saoudite. Le ministre conservateur (CDU) faisait référence à la décision annoncée la veille par la chancelière Angela Merkel de ne plus autoriser de nouvelles exportations d'armes vers l'Arabie saoudite. Le porte-parole de la chancelière a précisé pour sa part que le gouvernement débattrait aussi de la possibilité de bloquer les exportations déjà autorisées ces derniers mois mais pas encore livrées. "Cela fera l'objet de discussion au sein du gouvernement", a déclaré Steffen Seibert lors d'un point presse régulier, sans plus de précisions.
Une question sensible en Allemagne. L'Allemagne a autorisé entre janvier et fin septembre de cette année 416,4 millions d'euros d'exportations d'armes vers l'Arabie saoudite. La question de ces ventes d'armement à Ryad est une source de tension permanente au sein du gouvernement d'Angela Merkel entre les conservateurs et les sociaux-démocrates. Ces derniers arguent que leur accord de coalition prévoit un arrêt des ventes d'armes aux protagonistes de conflits militaires, ce qui est le cas de l'Arabie Saoudite au Yémen.
Les ventes d'armes de l'Allemagne sont cependant mineures comparées à celles de ses partenaires européens, Royaume-Uni et France en tête. Jusqu'ici, Paris et Londres ont indiqué ne pas vouloir revoir leur politique en la matière, la jugeant suffisamment rigoureuse.
Une remise en cause de l'équilibre géopolitique ? Le meurtre de Jamal Khashoggi dans le consulat saoudien d'Istanbul, où il s'était rendu le 2 octobre pour des démarches administratives, a relancé le débat dans plusieurs pays sur un réexamen des relations avec Ryad. Les Occidentaux considèrent l'Arabie saoudite comme un allié stratégique pour la stabilité du Moyen-Orient, malgré son bilan en matière de droits humains. Ryad est aussi un client d'importance pour les grands groupes industriels et militaires américains et européens.