Au cœur d'une "guerre de l'énergie pour la prospérité et la liberté", l'Allemagne va débloquer jusqu'à 200 milliards d'euros supplémentaires. Cela dans le but de plafonner les prix du gaz et de l'électricité qui plombent son économie et le pouvoir d'achat des ménages. Depuis la reprise post-covid et surtout depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'UE est confrontée à une crise énergétique sans précédent depuis 50 ans, qui n'épargne aucun pays.
A l'image de l'Allemagne, première économie de l'Union, nombre de pays européens ont déjà mis en place place des dispositifs d'aide publique. Quelques-uns, comme la France et l'Espagne, appliquent un plafond aux prix de l'énergie. C'est ce que s'apprête à faire Berlin, comme l'a annoncé jeudi 29 septembre le chancelier Olaf Scholz, en présentant "un bouclier" doté de 200 milliards d'euros, décidé après des semaines de tractations au sein de la coalition. "Les prix doivent baisser (...), le gouvernement allemand va tout faire pour les faire baisser" aussi bien pour les ménages que pour les entreprises, a-t-il martelé.
L'inflation en Allemagne a bondi à 10,0% sur un an
En septembre, l'inflation en Allemagne a bondi à 10,0% sur un an, la valeur la plus élevée enregistrée depuis 1951, selon des chiffres provisoires publiés jeudi 29 septembre. "Nous nous trouvons dans une guerre de l'énergie pour la prospérité et la liberté", a ajouté le ministre des Finances Christian Lindner. Celui-ci souligne que la situation s'était aggravée "après le sabotage par des auteurs inconnus" des gazoducs Nord Stream en mer Baltique.
"Cette guerre de l'énergie a pour but de détruire une grande partie de ce que les gens ont personnellement construit pendant des décennies (...)", a déclaré le ministre. "Nous ne pouvons pas accepter cela et nous nous défendons", a-t-il ajouté, présentant les nouvelles mesures d'aide comme "une réponse claire à Poutine". Les détails du dispositif de plafonnement des prix, réclamé depuis des semaines par des entreprises prises à la gorge, doivent encore être peaufinés et la date d'entrée en vigueur de la mesure n'est pas encore connue.
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L'Allemagne dépendante au gaz russe
L'Allemagne paie au prix fort sa dépendance au gaz russe, qui représentait 55% de ses importations gazières avant la guerre en Ukraine. Elle doit désormais trouver d'autres sources d'approvisionnement sur le marché comptant où les prix ont explosé. Le pays va basculer dans la récession l'an prochain, pronostiquent les économistes et la crise énergétique va laisser des traces. "Les prix du gaz devraient rester bien au-dessus des niveaux d'avant la crise. Cela se traduira par une perte durable de prospérité" pour la première économie européenne, ont averti les principaux instituts économiques du pays dans leurs prévisions d'automne dévoilées jeudi 29 septembre.
Le "bouclier" annoncé par Berlin vient s'ajouter à de précédentes mesures de soutien totalisant déjà environ 100 milliards d'euros. Le plafonnement annoncé ce jeudi devrait être financé par le Fonds de stabilisation pour l'économie, créé pendant la pandémie pour soutenir les entreprises, et qui va être doté de moyens supplémentaires.
Ce fonds public exceptionnel, qui est financé via des lignes de crédits spécifiques et donc pas comptabilisé dans les dépenses budgétaires annuelles, permettra au gouvernement de rester dans les clous de ses engagements financiers. L'Allemagne veut en effet revenir l'an prochain à la règle du "frein à l'endettement". Un principe constitutionnel qui lui interdit de s'endetter à plus de 0,35% du PIB par année et qui était suspendu depuis 2020 en raison de la pandémie.
Si la règle budgétaire est officiellement respectée, la facture de la crise énergétique est déjà considérable pour le gouvernement Scholz qui a par ailleurs engagé la nationalisation, ou pris le contrôle, de plusieurs entreprises du secteur énergétique menacées de faillite.
Un projet de surtaxe sur le gaz laissé à l'abandon
En annonçant le plafonnement des prix de l'énergie jeudi 29 septembre, Berlin en a profité pour enterrer un projet de surtaxe controversée sur le gaz, qui aurait fait peser un poids supplémentaire sur les ménages et les entreprises du pays. Censée rentrer en vigueur le 1er octobre, cette surtaxe était destinée à soutenir les entreprises du secteur gazier en répercutant une partie de la hausse vertigineuse de leurs coûts sur les consommateurs. Mais elle avait suscité depuis son annonce cet été un tollé, et paraissait de plus en plus caduque après la nationalisation en septembre de Uniper, le premier importateur allemand de gaz russe.