Un juge d'instruction a ordonné un procès devant le tribunal correctionnel à Paris pour l'oncle de Bachar al-Assad, soupçonné de s'être frauduleusement bâti en France un empire immobilier, estimé à 90 millions d'euros. Le juge parisien Renaud Van Ruymbeke a renvoyé sur les bancs des prévenus Rifaat al-Assad, 81 ans, afin qu'il soit jugé pour "blanchiment en bande organisée" de fraude fiscale aggravée et de détournements de fonds publics aux dépens de l'État syrien, selon l'ordonnance dont a eu connaissance l'AFP.
Soumis depuis juin 2016 à un contrôle judiciaire
Ancien pilier du régime syrien, le frère de l'ex-président Hafez al-assad, dont la fortune colossale en Europe avait attiré les soupçons, est soumis depuis sa mise en examen en juin 2016 à un contrôle judiciaire qui limite ses déplacements à l'international. Rifaat al-Assad a toujours soutenu devant les enquêteurs que sa fortune provenait des largesses du royaume saoudien, des justifications que le magistrat a jugé insuffisantes.
Ancien pilier du régime syrien, Rifaat al-Assad avait été chef des forces d'élite de la sécurité intérieure, les Brigades de défense, qui avaient durement réprimé en 1982 une insurrection islamiste à Hama. Il avait été contraint à l'exil dès 1984 après un coup d'Etat manqué contre son frère Hafez, le père de Bachar, qui dirigea le pays de 1971 à 2000. A son arrivée en Europe au début des années 1980, Rifaat al-Assad avait accumulé un impressionnant patrimoine immobilier, jusqu'à ce que la justice se penche sur son cas et ouvre une information judiciaire en avril 2014, après une plainte de l'ONG anticorruption Sherpa.
Un patrimoine immobilier évalué à 90 millions d'euros en France
En France, le juge soupçonne notamment Rifaat al-Assad d'avoir "mis à l'abri son patrimoine immobilier", évalué à 90 millions d'euros, dans des sociétés "immatriculées dans des paradis fiscaux". La plupart de ses biens - dont deux hôtels particuliers et une quarantaine d'appartements, un haras et un château - ont été saisis. Tout comme plus de 500 biens, d'une valeur de 691 millions d'euros, en Espagne après une vaste opération policière en 2017.
"Le symbole historique est fort qu'un ancien responsable du pouvoir sanguinaire de Damas, oncle de Bachar, rende des comptes pour des crimes d'argent qui ne doivent pas faire oublier les crimes de sang qu'il a commis", a réagi auprès de l'AFP William Bourdon, président-fondateur de Sherpa.