La Russie et la Chine ont mis leur véto vendredi à une résolution américaine à l'ONU soulignant la "nécessité" d'un cessez-le-feu "immédiat" à Gaza, l'ambassadeur russe dénonçant un texte "hypocrite" qui n'appelle pas directement à faire taire les armes. Le projet de résolution américaine qui insiste sur la "nécessité d'un cessez-le-feu immédiat et durable" en lien avec la libération des otages, a recueilli 11 voix en faveur, trois voix contre (Russie, Chine et Algérie) et une abstention (Guyana).
Les informations à retenir :
- La Russie et la Chine ont mis leur véto sur une résolution américaine de l'ONU pour un cessez-le-feu "immédiat" à Gaza
- Le secrétaire d'État américain Antony Blinken est arrivé vendredi en Israël
- Benjamin Netanyahu a fait savoir à Antony Blinken qu'Israël comptait bien mener une offensive à Rafah, même si les États-Unis devaient ne pas le soutenir.
- Emmanuel Macron veut chercher un "accord" à l'ONU après le veto russe et chinois
Le Hamas salue les veto de la Chine et de la Russie au projet de résolution américain
Le Hamas a salué vendredi les veto de la Chine et de la Russie au projet de résolution américain présenté au Conseil de sécurité des Nations unies sur une trêve dans la guerre entre Israël et le mouvement palestinien dans la bande de Gaza. "Nous exprimons notre appréciation à l'égard de la position de la Russie, de la Chine et de l'Algérie qui ont rejeté la résolution américaine biaisée", indique le mouvement islamiste dans un communiqué, dénonçant notamment la "formulation trompeuse" de ce texte.
"Le projet de résolution américain rejeté au cours du vote aujourd'hui au Conseil de sécurité de l'ONU contenait une formulation trompeuse complice des objectifs de l'ennemi sioniste criminel, et lui permet de poursuivre son agression", estime le Hamas. Pour l'organisation, le texte accordait "une légitimité à commettre une guerre génocidaire contre le peuple palestinien dans la bande de Gaza, la résolution n'incluant pas de demande explicite de cessez-le-feu immédiat".
Netanyahu à Blinken : Israël mènera une offensive à Rafah, même sans le soutien des États-Unis
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a fait savoir vendredi au secrétaire d'État américain, Antony Blinken, qu'Israël comptait bien mener une offensive à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, même si les États-Unis devaient ne pas le soutenir.
"J'ai dit que nous n'avions pas la possibilité de défaire le Hamas sans entrer dans Rafah et sans éliminer les bataillons qui y restent. Je lui ai dit que j'espérais le faire avec le soutien des États-Unis, mais s'il le faut, nous le ferons seuls", a-t-il dit dans une déclaration après sa rencontre à Tel-Aviv avec le responsable américain. "Je lui ai dit que j'appréciais vraiment le fait que nous ayons été unis dans la guerre contre le Hamas pendant plus de cinq mois. Je lui ai aussi dit que nous reconnaissions la nécessité d'évacuer la population civile des zones de guerre et de prendre en charge les besoins humanitaires, et bien sûr nous œuvrons en ce sens", a encore dit le chef du gouvernement.
Les deux hommes se sont entretenus pendant environ 40 minutes vendredi matin. Outre l'urgence d'accroître l'aide humanitaire dans le territoire palestinien, Antony Blinken devait sommer Israël de ne pas lancer d'offensive terrestre majeure à Rafah.
Macron veut chercher un "accord" à l'ONU après le veto russe et chinois
Le président français Emmanuel Macron a exprimé vendredi sa volonté de trouver "un accord" au Conseil de sécurité de l'ONU, après le veto de la Russie et la Chine à une résolution américaine soulignant la "nécessité" d'un cessez-le-feu "immédiat" à Gaza.
"Il faut maintenant que le Conseil de sécurité se prononce sur un cessez-le-feu immédiat et un accès humanitaire. Après le veto posé par la Russie et la Chine il y a quelques minutes, nous allons reprendre sur la base du projet de résolution français au Conseil de sécurité et travailler avec nos partenaires américains, européens, arabes en ce sens pour trouver un accord", a-t-il déclaré à l'issue d'un sommet européen à Bruxelles.
Les États-Unis souhaitent éviter l'offensive terrestre à Rafah
Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, est arrivé vendredi en Israël où il devrait insister sur l'urgence d'accroître l'aide humanitaire à Gaza. Après cinq mois et demi de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas dans la bande de Gaza assiégée, au bord de la famine, Washington cherche aussi à convaincre son allié d'éviter une offensive terrestre sur la ville surpeuplée de Rafah, redoutant de lourdes pertes civiles.
Le Royaume-Uni, membre permanent du Conseil de sécurité, et l'Australie ont appelé vendredi à une "fin immédiate des combats" dans la bande de Gaza, pour y permettre "l'acheminement de l'aide et la libération des otages" enlevés en Israël le 7 octobre lors de l'attaque sanglante du Hamas. Pendant que les diplomates s'activent, les affrontements se poursuivent à travers le territoire palestinien, notamment dans et autour de l'hôpital al-Chifa, le plus important du territoire, où l'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué plus de 150 combattants palestiniens et arrêté des centaines de suspects depuis le début de la semaine.
Cette opération d'envergure lancée lundi contre ce complexe hospitalier a poussé des centaines de civils à fuir. "Le fossé se réduit" dans les négociations pour une trêve associée à une libération d'otages, a assuré jeudi Antony Blinken. "S'il est difficile de parvenir" à un accord, "cela est toujours possible", a-t-il ajouté.
Un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU sur un "cessez-le-feu immédiat"
En parallèle de ces pourparlers, les États-Unis ont pour la première fois présenté un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU sur un "cessez-le-feu immédiat lié à la libération des otages" retenus à Gaza depuis le début de la guerre. Le texte, consulté par l'AFP et qui doit être soumis vendredi au vote, souligne "la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat et durable pour protéger les civils de tous côtés, permettre la fourniture de l'aide humanitaire essentielle". L'issue du vote est toutefois incertaine alors que la Russie réclame un "appel" plus clair à faire taire les armes.
"Il y a de meilleurs moyens de gérer la menace du Hamas"
Les États-Unis ont déjà mis leur veto à plusieurs résolutions du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu, estimant que cela aurait bénéficié au Hamas. Mais face à la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza, Washington intensifie ses efforts pour parvenir à une trêve, acheminer de l'aide et éviter une offensive terrestre sur Rafah, ville à la frontière égyptienne où s'entassent selon l'ONU environ 1,5 million de Palestiniens, la majorité déplacés par la guerre dans le reste du territoire.
"Il y a de meilleurs moyens de gérer la menace du Hamas", a déclaré jeudi Antony Blinken, qualifiant "d'erreur" une éventuelle invasion terrestre de Rafah. En dépit des pressions internationales, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, affirme qu'une offensive sur Rafah est nécessaire pour "vaincre" militairement le Hamas à Gaza et éviter un autre 7 octobre.
La guerre a éclaté ce jour-là quand des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque sans précédent dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, pour la plupart des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Selon Israël, environ 250 personnes ont été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 33 seraient mortes. En représailles, Israël a juré de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l'Union européenne. Son armée a lancé une offensive qui a fait 31.988 morts à Gaza, selon le dernier bilan en date du ministère de la Santé du mouvement islamiste.
Mossad et CIA au Qatar
Lors de sa sixième tournée au Moyen-Orient depuis le début de la guerre, Antony Blinken a rencontré jeudi au Caire le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, pour discuter des moyens de parvenir à un cessez-le-feu.
Les discussions sur une trêve se poursuivent à Doha entre représentants des États-Unis, du Qatar et de l'Égypte. Le chef du Mossad, les services de renseignement israéliens, David Barnea, doit y rencontrer vendredi le directeur de la CIA, William Burns, le Premier ministre qatari, Mohammed ben Abdelrahman, Al-Thani et le chef des services de renseignement égyptiens, Abbas Kamel.
Après avoir exigé un cessez-le-feu définitif, le Hamas a infléchi sa position la semaine dernière en acceptant le principe d'une pause de six semaines dans les combats. Mais des différends semblent persister sur l'échange d'otages israéliens détenus à Gaza contre des prisonniers palestiniens écroués en Israël.
"Les enfants meurent de faim"
Israël impose un siège complet à la bande de Gaza depuis le début de la guerre et contrôle strictement l'aide qui arrive principalement depuis l'Égypte via Rafah. Or ces contrôles serrés, selon l'ONU, ont pour effet de réduire le nombre de camions entrant dans le territoire. "Les enfants meurent de faim. Ils sont privés de nourriture", s'est alarmé jeudi le Comité des droits de l'enfant des Nations unies. "Même les miettes sont difficiles à trouver", affirme-t-il.
Afin de soulager la population, plusieurs pays organisent des parachutages de nourriture et ont ouvert un couloir maritime depuis Chypre vers Gaza. Mais l'aide reste insuffisante face aux besoins des 2,4 millions d'habitants de Gaza et ne parvient que très difficilement dans le nord, où vivent plus de 300.000 personnes selon l'ONU.
"Voici nos enfants, voyez-vous leur état ? Nous ne savons pas comment les nourrir", a déclaré jeudi à l'AFP une Palestinienne fuyant les combats dans le secteur de l'hôpital al-Chifa. "Nous sommes assiégés depuis trois jours, nous ne pouvons rien leur donner à manger ou à boire".