"Cela va sûrement, malheureusement, empirer avant de s'améliorer. Je n'aime pas dire ça mais c'est comme ça." Ces propos alarmistes sur l'épidémie de coronavirus ont été prononcés par... Donald Trump, mardi soir. Après des mois à nier l'ampleur de l'épidémie de covid-19 aux États-Unis - pays le plus endeuillé du monde avec 141.800 morts, et où les décès sont repartis à la hausse -, le président américain a brusquement changé de ton, deux jours après être apparu pour la première fois en public avec un masque. Un revirement à relier au contexte électoral très défavorable au chef d'Etat, candidat à sa réélection, selon le spécialiste des États-Unis Jean-Eric Branaa, invité mercredi d'Europe 1.
"C'est l'anti-Trump" par rapport aux six derniers mois
Mardi soir, "on a découvert un Donald Trump tel qu'on aurait aimé le voir depuis très longtemps, qui utilise son temps pour faire passer un message de santé publique, qui respecte la parole des experts médicaux, qui fait l'éloge des travailleurs de santé qui sauvent des vies, qui évite les attaques contre les démocrates. Et qui exhorte les Américains à porter des masques et à se tenir à l'écart des lieux bondés....", énumère l'expert au micro d'Europe 1.
"C'est l'anti-Trump par rapport à ce qu'on a pu avoir depuis six mois. On retrouve celui qu'on avait vu très brièvement, qui expliquait que l'Amérique allait vivre des temps très difficiles. Ça avait duré deux semaines avant qu'il ne reparte en campagne et qu'il oublie totalement ce message pour prendre le contre-pied et affirmer que la pandémie n'existait pas", décrypte Jean-Eric Branaa.
"Ses troupes les plus fidèles se trouvent bien démunies"
Ce "déni" a été "insupportable" jusque dans les rangs des supporters du président américain, qui affrontera le démocrate Joe Biden à l'automne, selon le spécialiste. Les enquêtes d'opinion ont montré "qu'ils allaient le quitter" pour son rival, ce qui explique certainement ce tournant aujourd'hui".
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Concrètement, "le pire se passe dans le sud des États-Unis, dans des États qui sont tenus par des Républicains (comme la Floride et le Texas, contraints d'imposer de nouvelles restrictions, ndlr), alors que justement la stratégie de Donald Trump était d'expliquer que c'était une mauvaise gestion démocrate qui faisait que cette pandémie se répandait aux États-Unis", selon Jean-Eric Branaa. "Aujourd'hui, on n'en est plus là. Ses troupes les plus fidèles, qui répétaient ces messages absurdes, se trouvent bien démunies."
Un sondage très largement favorable à Joe Biden
Mais ce changement de ton n'intervient-il pas trop tard ? Jean-Eric Branaa cite un sondage paru il y a quatre jours, réalisé par ABC et le Washington Post, qui "montre un écart de 15 points entre Joe Biden et Donald Trump". "Exactement le même sondage, il y a quatre ans, donnait trois points entre Trump et Clinton. On était dans la marge d'erreur, c'était une quasi-égalité", souligne-t-il. Un écart de 15 points, semble, au contraire "rédhibitoire" aux yeux de l'expert. "Il n'y a jamais eu dans l'histoire des États-Unis une remontada avec un tel écart à 100 jours de l'élection. (...) C'est totalement panique à bord."