"Êtes-vous enceinte ?". C'est par ce genre de questions que des dizaines de milliers de Chinoises ont été contactés ces dernières semaines par des fonctionnaires de leur quartier dans le but de savoir si elles s'apprêtaient à donner la vie ou pour les inciter à le faire. Une pratique d'incitation bien loin de celle des contrôles qui avaient été la norme dans le pays pendant des décennies. Mais la Chine fait face à une crise démographique sans précédent et Pékin a dû prendre des mesures pour tenter d'endiguer ce phénomène.
"Allez-vous accoucher à ma place ?"
Une campagne d'appel qui peut s'avérer particulièrement insistante pour certaines. Interrogée par nos confrères de RFI, Wang, 36 ans, n'a pas hésité à montrer son agacement à son interlocuteur : "Allez-vous payer pour m'aider ? Allez-vous accoucher à ma place ? Allez-vous m'aider à supporter les douleurs de l'accouchement et les séquelles ? Sans parler de l'épuisement. Si vous ne pouvez pas m'aider, arrêtez de dire des choses inutiles."
Les questions posées se montrent même très intrusives dans la vie privée de ces femmes. Huang, 35 ans et déjà mère d'un petit garçon, témoigne dans le journal chinois South China Morning Post, qu'une agente lui avait demandé à quand remontaient ses dernières règles. Cette dernière est même allée jusqu'à lui proposer de la recontacter lorsque ce "serait le bon moment" pour faire un enfant : "L'experte doit être de la génération précédente, qui n'a pas compris qu'elle s'adressait à une génération totalement différente, qui accorde beaucoup plus d'importance à la vie privée, à la qualité de vie et aux choix", explique-t-elle.
L'insistance de cette campagne d'appels montre que cette crise démographique est prise très au sérieux par le pouvoir chinois qui cherche par tous les moyens à comprendre les raisons de cette situation et tenter de l'endiguer.
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Des nouvelles mesures pour relancer la natalité
En janvier 2024, le Bureau national des statistiques chinois annonce pour la deuxième année consécutive une baisse de la population de "2,08 millions" de personnes par rapport à fin 2022. Cette crise démographique n'est pas près de ralentir. Selon les projections les plus pessimistes des démographes, la population chinoise atteindrait à peine les 600 millions de personnes en 2100. Pour tenter d'inverser la tendance, la Chine a abandonné en 2015 la politique de "l'enfant unique", mise en place en 1979 pour... ralentir la croissance démographique. Depuis 2021, tous les couples peuvent avoir jusqu'à trois enfants.
Mais cela ne suffit pas. Les principales raisons invoquées pour expliquer cette baisse de la natalité sont : le coût élevé de l'éducation d'un enfant jusqu'à ses 18 ans, estimée à 485.000 yuans (62.000 euros) ce qui représente sept fois le PIB par habitant, selon le cabinet pékinois YuWa Population Research ; la perte de confiance envers l'institution du mariage ; et par le vieillissement de la population, les plus de 60 ans représentent aujourd'hui 20% de la population et pourraient atteindre un tiers en 2035.
Ce lundi, le pays a annoncé une nouvelle série de mesures pour "encourager le respect de la procréation". Parmi elles, nous retrouvons l'amélioration de l'assurance maternité, des congés maternités, des ressources médicales dédiées aux enfants. La Chine mise aussi sur l'éducation, l'emploi et le logement en encourageant les autorités locales à renforcer les aides financières pour les étudiants et les familles nombreuses.