Depuis 13 jours, les routiers canadiens mènent une fronde sans précédent à Ottawa et dans d’autres villes du pays. Ils sont entre 400 et 500, dans leurs camions, à protester contre les mesures sanitaires imposées par le gouvernement. Un mouvement de contestation lancé pour protester contre l’obligation vaccinale des routiers canadiens pour franchir la frontière avec les Etats-Unis. La manifestation s’est rapidement élargie à toutes les mesures de lutte contre le Covid-19, du vaccin au port du masque, jugées liberticides.
Quelques concessions dans certains Etats
Face à l’ampleur de la mobilisation, le gouvernement canadien a commencé à faire des concessions. Pour la première fois depuis la mise en place de nouvelles restrictions liées à la vague Omicron, le Québec a confirmé un calendrier détaillé des allègements à venir. Certaines provinces ont annoncé de nouveaux allégements : la Saskatchewan et l’Alberta vont même renoncer au passeport vaccinal, estimant que "les avantages ne l’emportent plus sur les coûts".
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Une victoire pour ces manifestants, mais qui n’est pas suffisante selon Simon Vallée, un des leaders du mouvement. Il souhaiterait que toutes les mesures liées au Covid-19 soient abrogées. Ce routier a quitté Stanstead le 28 janvier. Son camion est garé dans une des rues d’Ottawa, où il est arrivé parmi les premiers. Il attend l’annonce de la fin des restrictions pour lever le camp, quitte à sacrifier son gagne-pain : "C’est quelque chose qui me tenait à cœur."
Propriétaire de son camion, cette manifestation bloque toute entrée d’argent pour Simon Vallée pour qui le jeu en vaut la chandelle, comme il l’explique : "Mon camion ne travaille pas, j’ai des dettes, mais je m’en fous."
Les klaxons des poids-lourds réduits au silence
Depuis lundi soir, afin que la ville retrouve une certaine paisibilité sonore, les klaxons ont été interdits après une décision de justice. "On bloque encore les rues mais on est n’est pas bruyant comme on l’était auparavant", ajoute Simon Vallée. Et pour cause, certains de ces routiers ont décidé de faire entendre leur voix autrement : faire vrombir les moteurs de leurs poids lourd, rendant l’air irrespirable.
Devant le camion de Simon Vallée, une boite aux lettres est posée, dans laquelle peuvent être posées des lettres de soutien. Un soutien qui ne manque pas : près d’un tiers des Canadiens soutiennent le mouvement et 44% des personnes vaccinées comprennent "la cause et les frustrations véhiculées par les protestataires".
La boîte aux lettres posée devant le camion de Simon Vallée.
Crédits : Simon Vallée.
Des encouragements que confirme Simon Vallée sur place : il raconte même rencontrer parfois de petits garçons qui lui confient vouloir être camionneurs pour "devenir un héros". Ce leader est ému lorsqu’il aborde la question des soutiens : "J’ai vu l’amour, la joie et l’espoir des gens de vivre un avenir sans Covid… Ce sont des émotions qui ne s’expliquent pas". Et ces encouragements, le routier en aura besoin, il affirme que tant que toutes les restrictions sanitaires, du port du masque au pass vaccinal, ne seront pas abrogées, il ne lèvera pas le camp.
Justin Trudeau : le bon pari ?
De son côté, Justin Trudeau, le Premier ministre Canadien, ne semble pas prêt à changer de position. Resté silencieux pendant plusieurs jours, il a dénoncé lundi le mouvement et estimé qu’il fallait que "cela cesse" avant d’ajouter ce mardi : "Nous sommes tous fatigués des restrictions, de devoir faire des sacrifices quasiment tous les jours, mais notre responsabilité en tant que gouvernement c’est d’assurer la santé et la sécurité de tout le monde" à la Chambre des communes. Le Premier ministre qui fait le pari d’un mouvement qui sera amené à s’essouffler de lui-même.
Un mouvement qui dépasse les frontières canadiennes
Le "convoi des libertés" s’est exporté à l’international : des mouvements similaires ont été signalés en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Angleterre, en Nouvelle-Zélande ou encore en Australie sans forcément connaître un tel retentissement. En France, des opposants aux restrictions sanitaires se sont donné rendez-vous samedi à Paris. Les premiers convois ont pris la route vers la capitale dès mercredi.