Covid-19 : bienvenue en Inde, dans les usines du plus gros fabricant de vaccins au monde

Vaccin Inde coronavirus
Le Serum Institute of India est le plus gros fabricant de vaccins au monde. © Côme Bastin / Europe 1
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Côme Bastin, correspondant en Inde, édité par Margaux Baralon. Photos : Côme Bastin , modifié à
Europe 1 a pu visiter les locaux du Serum Institute of India, le plus gros fabricant de vaccins au monde, dont l'activité est décuplée depuis le mois de mai dernier. Le laboratoire, engagée dans une intense compétition mondiale, s'apprête à sortir des millions de doses d'ici à la fin décembre. 
REPORTAGE

Avec ses 55 hectares protégés comme une base militaire, abritant 50 usines et une piste d'atterrissage, le Serum Institute of India ressemble à une ville dans la ville. Partout dans ce laboratoire pharmaceutique situé à Pune, non loin de Bombay, des bâtiments semblent sortir de terre et des ouvriers s'activent. Avant la pandémie de coronavirus, c'était déjà le plus grand fabricant de vaccins au monde. Désormais, son activité redouble. Sur le pied de guerre dès le mois de mai dernier, le Serum Institute of India travaille avec Oxford sur le vaccin AstraZeneca. Et se prépare à produire 100 millions de flacons de dix doses d'ici à la fin décembre.

Ultra-confidentialité

Cette activité intense a demandé de l'argent. Beaucoup d'argent. "Nous avons calculé qu'avec de nouvelles usines, il nous serait facile de produire un milliard de doses par an", explique Suresh Jadav, directeur exécutif du laboratoire privé. "Le Serum Institute a donc investi 250 millions de dollars. L'Alliance globale pour les vaccins [Gavi, une organisation internationale] nous a financé à hauteur de 300 millions supplémentaires."

Couloirs infinis, chambres stériles, machines high-tech, employés en blouse et flacons qui sortent à la chaîne : l'une des usines qui produit déjà le vaccin, baptisé Covishield, ressemble en tous points à l'image qu'on se fait d'un laboratoire de cette envergure. Y compris au niveau de la sécurité. Si nous avons pu visiter les locaux, il nous a été interdit de diffuser la parole des scientifiques présents sur place. La politique de la maison, c'est l'ultra-confidentialité.

L'entrée principale du Serum Institute of India (1)

Un vaccin moins cher pour les pays pauvres

Le Covishield doit d'abord profiter à l'Inde, qui devrait l'administrer dès le mois de janvier à son personnel soignant et municipal. C'est-à-dire, car on parle de la deuxième population mondiale, quelque 30 millions de personnes. Puis, ce sera au tour du reste de la population et aux 57 pays qui bénéficient de l’aide du Gavi, soit les pays les plus pauvres, principalement en Afrique. Pour eux, le PDG du Serum Institute, Adar Poonawala, s’est engagé à fournir un vaccin coûtant moins de 3 euros la dose. Pour l’instant, aucun contrat n'est prévu avec la France. 

Mais même s’il est bien avancé dans la production, le Serum Institute n'est pas seul. Il fait face à une immense compétition mondiale, avec par exemple le vaccin de Pfizer et BioNTech, déjà administré en Grande-Bretagne, ou encore le Sputnik V russe. En Inde aussi, d'autres producteurs géants, comme Bharat Biotech ou Zydus-Cadillac, sont sur le point de lancer leur propre produit.

Le Campus du Serum Institute of India (1)

Une compétition mondiale intense

Pas de quoi inquiéter Suresh Jadav, qui fait rapidement le calcul. "Même si on ne vaccine que 75% de la planète, il va falloir 12 milliards de dose", rappelle le directeur exécutif du Serum Institute. "Aucun producteur n’a aujourd’hui ces capacités. On va donc avoir besoin de tout le monde au départ." Et après ? "La compétition va se jouer sur le choix de vaccin des États. Ils se baseront pour cela sur plusieurs critères. Le vaccin est-il sûr ? Est-il efficace ? Immunise-t-il à long terme ?" Mais les considérations logistiques entreront aussi en ligne de compte. "Est-ce qu'il est facile à conserver, à transporter, à administrer ?"

Presque prêt, le vaccin Covishield est encore en phase 3 de tests. Le Serum Institute a demandé à l'OMS une autorisation d'urgence pour le commercialiser et déjà passé un autre contrat avec le laboratoire américain Novavax pour un milliard de doses d'un autre vaccin. Une hyperactivité qui paye : le Serum Institute vaudrait aujourd’hui plus de 10 milliards de dollars.