Faire un don d'organe pour sortir plus vite de prison. Voici l'option qui pourrait s'offrir aux détenus du Massachusetts aux États-Unis en cas d'adoption d'un projet de loi porté par deux élus démocrates. Ces derniers souhaitent en effet élaborer un vaste programme de dons d'organes au sein des établissements pénitenciers du Massachusetts, comme le rapporte The Guardians. Par ce biais, les personnes incarcérées pourraient bénéficier d'une remise de peine allant de 60 à 365 jours. Un comité serait alors chargé de déterminer les critères d'éligibilité ainsi que la réduction de peine à attribuer selon "la quantité de moelle osseuse et d'organe(s) donné(s)". Néanmoins, les deux élus se heurtent à divers obstacles.
Des contraintes juridiques
À ce jour, le Bureau fédéral américain des prisons n'autorise aucun don d'organe si le receveur n'appartient pas à la famille proche du détenu. Il est d'ailleurs tout simplement impossible d'opérer le moindre don dans de nombreuses prisons d'État, y compris dans le Massachusetts, faute de logistique adaptée. Par ailleurs, ce projet de loi pourrait transgresser la loi fédérale américaine, comme le rappelle le Miami Herald. La loi nationale sur la transplantation d'organes, adoptée en 1984, criminalise le don ou la réception de tout organe humain, moyennant une contrepartie.
Et la proposition n'a pas tardé à déclencher un certain scepticisme. "Nous sommes préoccupés par le potentiel de coercition et l'impact de soins médicaux inadéquats en milieu carcéral. Nous pensons que la solution doit cibler les problèmes structurels sous-jacents conduisant aux disparités en matière de santé", a estimé Jesse White, le directeur des politiques des services juridiques des prisonniers du Massachusetts auprès de McClatchy News.
"Aucune raison impérieuse d'interdire cela"
De son côté, Judith Garcia, l'une des deux signataires de cette proposition de loi, préfère y voir une possibilité pour les détenus de "restaurer (leur) droit à disposer de leurs corps en leur donnant l'opportunité de donner un organe ou de la moelle osseuse". Selon l'élue, une telle disposition permettrait de récompenser leur décision "en leur offrant des peines réduites". Son collègue Carlos Gonzalez, également porteur du projet, ne voit quant à lui "aucune raison impérieuse d'interdire cela aux détenus". Et considère que cette loi pourrait profiter à certaines minorités pour qui l'accès au soin relève parfois du casse-tête. "Élargir le bassin de donneurs potentiels est un moyen efficace d'augmenter la probabilité que les membres des communautés noires et latinos reçoivent un traitement salvateur", a-t-il estimé dans McClatchy News.
Selon le United Network for Organ Sharing (Unos), 104.413 personnes sont en attente d'une greffe aux États-Unis dont 58.970 sur une liste d'attente.